A l'heure de la post vérité et des réseaux sociaux où les politiques peuvent aisément manipuler les foules avec des slogans accrocheurs qui permettent de résumer des situations très complexes pour rassurer les gens, Don't Look Up s'inscrit le genre de la comédie satyrique, une satyre pas seulement des politiques, mais une satyre de notre société actuelle, dans ce qu'elle a de pire, et le constat est très alarmant, et on peut ressentir à travers le long métrage, l'urgence qu'il en découle tout du long. Car l'histoire de Don't Look Up est certes une caricature à l'image d'un South Park ou des gens très importants prennent des décisions très ridicules, mais c'est aussi une déprimante photographie de notre monde actuel, un monde qui replié sur lui-même qui n'est plus qu'alimenté par un cynisme ambiant, où l'espoir est ridiculisé et la détresse moquée puis transformée en meme sur Twitter.
L'ère du capitalisme individualiste et héroïque triomphant des années 80-90 est révolue à l'image de ce grand héro Américain qui doit faire finalement demi-tour, lui qui 30 ans plus tôt aurait été le héro parfait à l'instar d'un Bruce Willis dans Armageddon, mais de nos jours le capitalisme tel qu'il est présenté est plutôt un destructeur d'héroïsme, qui laisse place à un tas de gars riches de ne plus agir non plus dans l'intérêt du monde, mais dans celui du Marché, un Marché omniprésent dans ce film, car il dicte si oui ou non la mission va réussir, et le PDG de Bash principal contributeur à la campagne de la Présidente, un ersatz de Elon Musk dicte la pluie et le beau temps dans les décisions du Gouvernement, et symbolise les frontières poreuses entre pouvoir et capitalisme.
Car évidemment, le film parle du changement climatique, et surtout parle de la non-action des gouvernements face à cela, qui sont principalement bloqués par des logiques électoralistes empêchant toute action d'être prise, et quand des actions sont prises elles sont instrumentalisées avec de la communication rondement menée qui est censée pouvoir manipuler les foules facilement à base de slogans, de phrases chocs.
"Don't look up" ne regardez pas le drame qui va se produire, il vaut mieux ne pas faire attention et continuer notre vie comme si rien ne se passait, évidemment, on peut y voir une référence au discours Conservateur climatosceptique ambiant, un discours relayé 24/24 sur des chaines dédiées à la manipulation des masses, que ce soit ces deux présentateurs très bankables et consensuels qui n'oseraient pas dire un mot plus haut que l'autre pour ne pas froisser l'audimat, ou ces conservateurs sur leur plateau parsemé de bannières étoilés un peu partout.
Adam Mcckay est un de ces réalisateurs très reconnaissables, montage très rythmé, 10 images à la seconde, Vice était fait de la même manière, ce qui fait que l'ennui pointe rarement le bout de son nez et les 2 h 10 du film ne viennent pas contrarier mon appréciation du film, l'écriture est intelligente, et ne tombe pas selon moi dans la condescendance, car il serait simple de dire que Mcckay prend de haut les "complotistes" mais pour moi ce n'est pas cela, le personnage de Timothée Chalamet par exemple est attachant et montré avec tendresse, non les véritables cibles de ce film sont les politiciens qui se servent du désespoir des gens pour se faire élire, et les lobbys évidemment.
On peut tout à fait voir dans ce film aussi, une critique du service privé qui supplante le service public, la Nasa se voit remplacer par une entreprise privée (on pense bien sûr à Space X) et n'agit plus dans l'intérêt de tous, mais dans l'intérêt du Capitalisme.
Je ne sais pas si Adam Mcckay est un anti-capitaliste en puissance, mais ce genre de discours avec un tel casting dans un film Américain en 2021 est franchement plaisant, et si je devais résumer cela :
Foncez, ce film malgré le fait qu'il soit très déprimant est une bouffée d'air frais, même si apparemment le film se fait défoncer aux US, les gens n'aimant pas qu'on leur mette le nez dans leur merde.