Quel film magnifique. On croirait avoir entendu un long et fin poème, mêlant à sa douceur, une dureté sans pareille. Des terres hivernales d'une Corée endiguée par la civilisation nippone, nous voguons accompagné des mots du poète Yun Dong-ju, vers un Japon fleurissant d'idéologies castratrices. Mais les étoiles, le ciel et le vent, n'ont ils pas à être semblables d'une contrée à l'autre ? Seule la poésie traverse la mer par le chemin d'une beauté trop douce pour ce monde.
Lors de la seconde guerre mondiale, la Corée subit ses dernière heures d'occupation Japonaise, ses citoyens leurs ultimes embrigadements, on aimerait y croire. Dans cette époque du tournant des années quarante, évolue deux cousins, Yun Dong-jin et Song Mong-gyu, deux aspirants étudiants, l'un ne vivant que de poésie lyrique et belle tandis que l'autre s'enflamme en de vifs essais. Dans leurs pérégrinations, entre esprits spoliés et croyances existentialistes, nos deux héros grandissent pour ne jamais se ressembler. Quand l'un n'aspire qu'à une poésie d'un monde rêvé, l'autre prépare la révolution de ces laissés pour compte, de ces Coréen qui souhaitent en finir avec l'envahisseur. Dès les premiers temps du film nous savons que c'est un échec mais nous ne savons réellement pas ce qu'il en est de la vérité.
Là où Dongju est particulièrement bon c'est dans son essence contemplative et sa force caractérielle, c'est dans la justesse des passions qui l'anime. La liberté est sans cesse recherchée, les rêves, sans relâche, fantasmés. Ces personnages des deux cousins sont tellement pertinents, ils sont cet élan créateur qu'on a trop longtemps tenté de rabrouer.
Sans pour autant chercher à tirer les larmes de son spectateur, Dongju parvient à faire son effet : il n'y aucune honte à être honteux, honteux de soi, de son monde et de ses dires.
Une expérience formidable et très instructive.