"J'vous raconte pas"

Basé sur une histoire vraie, bien que modifiée à certains égards, notamment pour créer un lien particulier entre Johnny Depp et Al Pacino, principaux protagonistes de ce film sur la pieuvre new-yorkaise, Donnie Brasco reste classique dans sa réalisation mais parvient à s'attirer notre sympathie.

En effet, au delà d'une caméra qui ne réserve pas beaucoup de surprises, on a un scénario avec une intrigue habile et bien ficelé qui repose sur deux points essentiels.

Déjà, on a une reconstitution d'époque fidèle, sobre et pas tape à l'œil, aux couleurs vraies, qui accentue le côté déprimant et noir de la vie des deux acteurs principaux et du monde dans lequel ils baignent. Contrairement à un Scorcese, dont les images restituent un univers faste, aux couleurs plus lumineuses, avec des mouvements de caméra qui mettent plus en avant l'univers de la Mafia, et qui la subliment, ici Mike Newell insiste sur son revers glauque, brutal et misérable.

Puis vient l'interprétation riche et habitée de Pacino, en sous-fifre meurtrier et attachant. La clé de la réussite de Donnie Brasco tient certainement à lui, à l'épaisseur qu'il a su donner à son personnage, tour à tour drôle, têtu, boudeur, maladroit et rêveur. C'est peut-être l'une de ses meilleures interprétations. Johnny Depp, à l'apogée de sa gloire, beau, élégant, contenu, livre également une très belle performance. Mais c'est leur relation qui fait toute la richesse de l'intrigue, car l'alchimie est palpable, et leurs échanges est d'un naturel à en éclipser le reste du casting.

On peut reprocher au film de manquer d'envergure, de ne pas créer d'ambiance suffisamment anxiogène, de manquer de rythme parfois, mais Donnie Brasco n'est pas un film de mafiosi traditionnel, c'est avant tout une histoire d'amitié trahie d'avance, et un témoignage sur la désillusion d'un homme (Pacino), dont la vie misérable revêt un nouveau sens lorsqu'il se fait le mentor d'un jeune agent infiltré.