Avant de devenir le titre d'un film érotique des années 80, "Dortoir des grandes" fut une comédie policière des années 50, située dans un pensionnat de jeunes filles.
Pour sa première enquête, un jeune inspecteur (Jean Marais) doit élucider la mort d'une adolescente, survenue au sein d'un établissement de province strict et select.
Dans cette atmosphère ô combien féminine, le pauvre homme rencontre des difficultés pour affirmer son autorité et démêler les différents secrets existant au sein de ce gynécée.
L'occasion pour le réalisateur Henri Decoin de saupoudrer son polar d'une bonne dose d'humour, d'une satire des mœurs bourgeoises et d'une touche d'érotisme. L'apparition fugitive d'un sein provoqua ainsi une interdiction aux moins de 16 ans à l'époque.
Surtout, Decoin a le bon goût de ne pas éluder la question du saphisme dans un tel lieu, puisque l'intrigue met clairement en évidence l'existence d'une relation particulière entre une élève et sa professeur de mathématiques.
Le principal défaut du film réside dans son aspect un peu mou : certaines séquences auraient clairement mérité un traitement plus dynamique.
On pourra également regretter la tonalité résolument légère, malgré certains constats plutôt amers, en imaginant ce qu'aurait donné le même récit sous l'angle de la noirceur et du malaise assumé.
Autre reproche : dans la version streaming que j'ai regardée, la photo était nettement sous-exposée et le mixage sonore très imparfait.
Enfin, la musique de George Van Parys, qu'on a connu plus inspiré, apparaît parfois envahissante.
Côté interprétation, Jean Marais se taille évidemment la part du lion : l'acteur ne démérite pas, mais la dimension érotique (un trentenaire au milieu de jeunes filles en fleurs) souffre aujourd'hui de son homosexualité bien connue.
Autour de Marais, la distribution des seconds rôles s'avère particulièrement réjouissante, entre comédiens confirmés (Louis de Funès, Denise Grey, Noël Roquevert) et débutantes prometteuses (Jeanne Moreau, Françoise Arnoul, Dany Carrel).
Au final, cette énième adaptation du romancier belge Stanislas-André Steeman se révèle une jolie petite réussite gentiment désuète, en dépit d'une certaine mollesse et de sa dimension policière finalement très secondaire.