Sur fond d'une musique qui, en permanence, exprime une tension sourde, y compris dans les (rares) scènes qui le montrent quelque peu apaisé, le personnage de Ryan Gosling, taiseux, limite inexpressif, observe chaque situation comme s'il cherchait sans cesse comment se ménager une issue, au cas où il faudrait fuir dans l'instant.

Cette tension musicale fait image avec celle, contenue, du protagoniste central de l'intrigue.

Drive en anglais, c'est bien sûr conduire un véhicule ; le terme désigne également la pulsion, l'instinct, l'action prête à surgir en un instant. "Le chauffeur", sans identité réelle, sans background et semble-t-il, sans but, n'existe que dans l'instant, dans son attente et par ses actes.

Le concernant ce drive est l'instinct de survie : tout paraît lent dans sa conduite, et des silences parfois fort longs conduisent à se demander s'il parlera enfin, ou restera silencieux, son cure-dents à la bouche.

Derrière le silence, la tension.

Derrière la tension, la violence.

Cette lenteur peut en un instant se résoudre dans l'action, qu'il mette le contact pour détaler avec une rapidité folle, ou qu'il fasse preuve d'une violence aussi soudaine que meurtrière.

Comme lorsqu'il conduit, avec la même rapidité, la même efficacité.

S'il n'est pas au volant d'une des voitures rutilantes qu'il répare dans une concession automobile, il est cascadeur pour le cinéma. C'est avec la même intrépidité que le conducteur Gosling, la nuit, convoie des braqueurs : au terme de casses millimétrés, il leur permet d'échapper à la police.

L'inexpressivité ici fait place à une forme de concentration extrême, une certitude dans l'action, sans aucune jubilation : un job fait sans passion, mais avec un professionnalisme imparable.

En définitive, l'histoire se résume à pas grand-chose : protéger la jolie voisine dont il est tombé amoureux, et son fils Benicio ; participer à des braquages où pendant cinq minutes, pas plus, il attend que ses complices sautent dans la voiture pour prendre la fuite.

Le mari de la jeune femme, incarné par Oscar Isaac, sortant de prison, doit rembourser une dette contractée afin d'être protégé, en détention, des violences diverses du monde carcéral.

Afin d'obtenir la somme nécessaire, il se lance dans un braquage ; il se fait abattre ; il s'avère que le donner d'ordres essaie de doubler le conducteur et ses acolytes, dont la sculpturale Christina Hendricks.

S'ensuit une scène d'une rare violence où les malfrats lancés à ses trousses, pensant se débarrasser du personnage principal, sont purement et simplement massacrés. On pense à A History of Violence, et en effet l'intrigue se concentre alors sur une vengeance à assoupir.

Je ne vais pas être plus et risquer de dévoiler des éléments cruciaux de l'action.

Qu'il soit dit simplement qu'on a là un très bon film, sans être pour autant un grand film.

Et le casting y est pour beaucoup, à commencer par Ryan Gosling qui démontre ici l'étendue de son vaste talent.

Mathieu-Erre
7
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le 20 févr. 2023

Critique lue 30 fois

Mathieu Erre

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