Eat the Night: Mange la violence du monde et regarde le feu

Film à la forme mutante, empreint d’écriture hybride, cyberpunk, mélancolique et fiévreuse à la Maurice G.Dantec (Les Résidents), Eat the Night de Caroline Poggi et Jonathan Vinel résonne avec rage et lueur de toutes les dissonances du monde.


Présenté à la Quinzaine des cinéastes en mai dernier, Eat the Night est une œuvre à l’écriture difficilement( et c’est tant mieux) classable dans un genre (le faut-il à tout prix!), en résonance avec les ombres d’un monde âpre et tragique, tentant le pari urgent d’une histoire d’amour et de sororités, de pactes romantiques et de sexualités lyriques par delà l’apocalypse, par delà les errances, les fins de jeux vidéo, les gangs, la drogue, le néant et la violence inanimée.


La vitalité brûlée, brusque et sauvage, tels des éclats fauves dans la lune, éclairent le beau Eat the Night.


Frère et sœur Apoline et Pablo vivent leurs solitudes, leurs désirs, révoltes et luttes à la marge du monde. Apo se réfugie dans Darknoon le jeu vidéo qui est sa vraie maison, le lieu refuge qui l’a vue grandir et dont la fin annoncée scande le rythme et la tonalité du film. Pablo lui a son cocon au milieu des bois: c’est là qu’il échappe au monde en fabriquant de l’ecstasy. Tabassé lors d’un de ses deals, Pablo (l’intense Théo Cholbi) est secouru par Night (le doux ataraxique Erwan Kepoa Falé).


Alors que la fin du serveur de Darknoon jette le film dans la tragédie nerveuse et son décompte syncopé, Pablo et Night s’aiment et arrachent à l’hostilité des petits mafieux des gangs leurs gestes crus et intimes.

Ce qui est envoûtant et presqu’hypnotique dans Eat the Night ce sont ses climats : sa Vitesse. Sa Brûlure. Son Intensité. Sa Brusquerie. Son Romantisme. Son Noir Avide. Ses Hétérotopies rauques et dressées. La somptuosité et langueur gothique du jeu vidéo Darknoon.


Les personnages de Pablo, Apo et Night dans leur asocialité, dans leur contestation sourde et mutique, sensible et épidermique font rage et échafaudent des espaces autres, des triades dissidentes et fragiles, des amours et amitiés loin des normes sociales, ancrés dans les forêts irréelles de Darknoon et les ailleurs stratosphériques des ports du Havre.


Caroline Poggi et Jonathan Vinel réussissent un film dark à la fulgurance scintillante, à la noirceur vibrante, un film à part, puissant et intimiste dont les marges sont des brèches, des Free Zone ardentes et libres.

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https://www.lemagducine.fr/cinema/critiques-films/eat-the-night-film-2024-avis-10070243/

VioletteVillard1
8

Créée

le 5 août 2024

Critique lue 23 fois

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