La balade sauvage
Au bord d’une plage jalonnée par les ombres et tapissée par un coucher de soleil, un groupe de personnes discute, rit de vive voix et s’amuse en promenant leur chien de course. Tout semble apaisé...
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Un chien qui court après un leurre. C'est sur cette première image que Larraín voudrait nous happer, curieuse métaphore de la vie de ces quelques hommes, et cette femme, qui vivent ensemble dans cette discrète bicoque au bord de la mer. Mais qui sont-ils ? Bercés par cette hideuse lumière terne, qui confère à l'endroit un hâle presque mortuaire, ces religieux ne respirent clairement pas le bonheur de la foi. Quel jour sommes-nous ? Peu importe, puisque leur vie est un jour sans fin, rythmé par la répétition inlassable des gestes, des oraisons, des horaires.
Très vite, les prières s'opposent aux cris révoltés d'un inconnu - vraisemblablement fou - qui vient réveiller jusque devant leur porte la plus grosse omerta de l'Église. Un curé, à bout, se donne la mort. Et soudain, toute notre illusion de quiétude s'effondre. Ces hommes de Dieu, sous leurs airs débonnaires, sont en réalité des monstres de délinquance, entre pédophilie et trafic d'adoptions.
Un autre prêtre est dépêché, dont la mission, délicate, se révèle on ne peut plus hypocrite, puisqu'elle consiste à raisonner ces hommes à la dérive, sans oser briser cette affreuse loi du silence qui est ici légion. Débute ainsi une très désagréable confession, sorte de mascarade ignoble brassant le plus grand mensonge. Chaque mot devient alors une torture auditive, chaque phrase un supplice. Dans ce huis-clos inquiétant, que l'on ne quitte jamais, "El club" n'aura de cesse de faire surgir le malaise.
Pire, plus le film avance et plus il devient un véritable "enfer sur Terre" pour le spectateur. Sincèrement, j'ai rarement été aussi inconfortable au cinéma; la dernière fois remontant à 2009 pour "Antichrist" (Lars von Trier) - et encore - essentiellement lorsque Charlotte Gainsbourg se découpe le clitoris en gros plan ... C'est dire ! En réalité, "El club" est plutôt une forme de purgatoire pour ces damnés, reclus pour espérer la miséricorde. D'ailleurs, l'espèrent-il vraiment ? Pablo Larraín dresse un portrait impitoyable de ces ecclésiastiques, tous plus malsains les uns que les autres. Effrayant !
D'un point de vue purement cinématographique, Larraín ne réalise pas un mauvais film. Et c'est d'ailleurs toute ma frustration, c'est-à-dire, d'admirer une peinture d'ensemble parfaitement juste, équilibrée, et en même temps, ne pas parvenir à l'aimer, heurtée par cette extrême violence morale...
Créée
le 5 déc. 2015
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