Camarade serial killer

Déjà, passer 2H15 au cœur de l'URSS stalinienne, ce n'est pas forcément une partie de plaisir.
Inspiré de la célèbre affaire Andrei Tchikatilo, "Child 44" est un drame sombre et pessimiste, qui montre les dégâts du totalitarisme sur la population russe, engoncée dans ses pseudo-certitudes, terrifiée et prête à tout pour survivre dans ce "paradis" autoritaire.

On peut reprocher au réalisateur suédois Daniel Espinosa de noircir outrageusement le tableau, ne laissant guère de respiration à son récit, à ses personnages et à son public, se refusant à proposer quelques scènes plus gaies de la vie quotidienne, par exemple. Ici, tout est noir, triste, sans espoir : soit, c'est un parti-pris, mais sachez donc que vous n'allez pas vous marrer.

L'autre problème de "Child 44", c'est qu'il se perd un peu dans ses différents axes narratifs : thriller d'espionnage, chasse au serial killer, film d'action, drame psychologique...
Le film est tout ça à la fois, et c'est sans doute trop ambitieux, car chacun des arcs scénaristiques est finalement survolé, à l'image du polar, dont le traitement se révèle très plat, sans fausses pistes ni rebondissements.

Le casting international était l'atout majeur du film, et chacun tient effectivement son rang, dans des rôles qui ne sont jamais complètement manichéens, ce qui est à mettre au crédit des scénaristes.
Dans ce registre, j'ai préféré Noomi Rapace (très convaincante) et Gary Oldman (sobre mais crédible) que Tom Hardy (pas mauvais mais traînant un air de chien battu pendant tout le film) ou Paddy Considine (caricatural). Joël Kinnaman et Vincent Cassel complètent honorablement la distribution.

Porté par une mise en scène solide, "Child 44" constitue une fresque historique ambitieuse, dont les auteurs n'assument hélas pas complètement la noirceur, en témoigne ce final rédempteur à deux balles.
On regrettera également quelques trous dans le scénario et surtout diverses longueurs rédhibitoires.