Je fais partie des suiveurs enthousiastes d'Asghar Farhadi depuis son deuxième film (il me manque le premier "Dancing in the dust", difficile à trouver). Et pour la première fois, j'avais été déçu par "Le client", son précédent métrage sorti il y a deux ans : je ne voyais pas trop où le réalisateur iranien voulait en venir, et j'avais trouvé le film ennuyeux.
Avec "Everybody knows", on revient en terrain connu - trop connu même, selon une majorité de cinéphiles. C'est peut-être ce qui explique mon indulgence avec ce thriller psychologique sans grande originalité ni audace, qui permet simplement à Farhadi de briller dans son domaine de prédilection, avec cette fameuse mécanique narrative selon laquelle chacun a ses raisons.
A mes yeux, la valeur ajoutée ici s'apparente un peu au travail de Verhoeven - toutes proportions gardées et chacun dans son registre - capable d'infiltrer le blockbuster ("Starship troopers") ou le polar américains ("Basic Instinct") comme la comédie de mœurs française ("Elle").
De son côté, après avoir enfilé les oripeaux du drame social français ("Le passé"), Farhadi investit la chronique familiale espagnole, tout en y intégrant ses propres codes et ses propres thématiques.
On assite donc à un mariage dans une bourgade rurale, l'iranien parvenant à mettre en scène les us et coutumes locaux avec aisance, mais la fête va se trouver bouleversée par la disparition d'une adolescente. S'en suivront un certain nombre de rebondissements, secrets de famille et autres conflits larvés qui pourront effectivement évoquer une telenovela, mais qui s'inscrivent indéniablement dans la culture latine.
L'autre plus-value réside dans le casting royal, qui rassemble notamment les deux grandes stars ibériques Penelope Cruz et Javier Bardem, sans oublier l'argentin Ricardo Darin.
Et puis Asghar Farhadi a toujours aimé les brunes, et le bonhomme a indéniablement du goût, lui qui m'a fait découvrir Golshifteh Farahani, Taraneh Allidousti ou encore Leila Hatami.
C'est bien simple, toutes les comédiennes ou presque sont canons dans "Todos lo saben" : de la gracile Barbara Lennie à la pulpeuse Inma Cuesta, la tourmentée Carla Campra ou la juvénile Sara Salamo, c'est un festival de beautés locales.
A l'image de ce dernier argument un peu spécieux, je comprends ceux qui n'auront pas été convaincu par le film, qui comporte trop de facilités et s'étire excessivement sur deux bonnes heures.
"Everybody knows" n'est certes pas le meilleur Frahadi, qu'on a connu bien plus inspiré ("Les enfants de Belle-Ville", "A propos d'Elly", "Une séparation"), mais les fans du réalisateur iranien devraient néanmoins y trouver leur compte, tant on y trouve une sorte de best of de son cinéma.
Il lui faudra néanmoins rapidement se renouveler, sous peine de se mettre à radoter.