Festen par Suzanne Marie Bénac-Colin
Depuis le temps que la madre en parlait, il a suffit de la venue d'une cinéphile curieuse pour nous lancer à le voir, ce truc danois !
Ma première réaction ; pas conquise, et indécise... Je souriais, et au fond de moi, je me suis revue après mon premier visionnage de Lolita : un truc malsain, mais vraiment excellent. Ce Vinterberg n'a eu peur de rien en tournant à la comédie un sujet supra-sensible et malheureusement jamais hors actualité. Oui, ça court les rues les papas pédophiles !
Ensuite, LA deuxième réaction, la vraie, en quelque sorte. Il se passe un vrai truc dans ce film. Je retiens.
Le Dogme 95... Un manifeste intéressant proprement appelé "Vœu de chasteté". Il s'agit de nombreuses restrictions toutes assez contraignantes, mais demandant un travail de folie et parfois minutieux, je suppose. Mais je me rends compte que suivre le dogme sans y mettre du talent donnerait certainement un film affreux, terriblement hautain.
Festen, ils évitent les jeux de camera inutiles, et caméra à l'épaule dit "je suis hooked !"
... À part peut-être dans les gros plans, nœud de cravate ou valise. Souvent la caméra se permet des audaces "puissantes" (on peut vivre un moment d'immobilité puis se retrouver au sommet du grand huit : c'est le cas de la plongée à travers la rampe d'escalier, le vertige de la descente d'un personnage, ou le passage du portail par une voiture en excès de vitesse)
Le film est très prenant, il n'y a pas à dire. Scotchée, complètement crispée sur le canap en attendant "non-stop" la suite. Quand on suit
l'histoire, on ne comprend pas comment les protagonistes ne s'entretuent pas tous, il y a des tartes à envoyer et des têtes à faire brûler !
Pour le fond - oui, on en arrive au viol, l'inceste - ...
Pourquoi ? c'est ce qu'on se demande, mais Festen ne donne pas de réponse, du moins pas de réponse gracieuse. Car le sujet est tellement grossier, ça dépasse des limites inimaginables, ce n'est que pure folie ! Le sentiment de frustration est plus que réel. Pourquoi provoquer cette crise seulement maintenant ? Au repas de famille presque trente ans après l'événement !
Tout aurait pu se passer pour le mieux dans le meilleur des mondes si seulement cette garce de mère, exaspérante de "poticherie" par ailleurs, avait agi quand il était encore temps. Mais non ! se taire c'est tellement mieux... Comment peut-on encaisser le "Papa, tu sais, quand tu me violait..." pour ensuite proposer la progression du repas à ses convives ?
Un excellent film à voir, une réflexion extrêmement intéressante; un viol tout comme un massacre d'enfants à Toulouse, le monde n'est que spectateur d'une grande crise, tout comme ces convives.
Enjoy !