Le film commence par une énorme baffe qu'un officier donne à un soldat qui encaisse béatement. Comme s'il souhaitait secouer son auditoire, le réalisateur Kon Ichikawa, auteur 3 ans auparavant de La Harpe De Birmanie, ouvre donc son film par un acte violent qu'il ne cessera de digresser pendant tout le déroulement de son œuvre
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La violence et surtout ses conséquences sur les hommes sont l'apanage de cette œuvre sur la guerre.
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Déroulant la déchéance et les déambulations d'hommes perdus qui tentent vainement de survivre foulant une terre boueuse. Le héros du film qui en est la totale anti-thèse se meut comme un zombie dont la seule chose qui le différencie d'un mort-vivant est ce refus justement d'abandonner l'ultime flamme d'humanité qui reste en lui. Il lave tous ses actes à l'eau, élément purificateur, notamment dans une scène où quand il tue un chien à l'aide d'une baïonnette il commencera d'abord par laver la lame de son méfait avant de se nettoyer le visage, ou bien quand il abat une femme avec un fusil qu'il finira par balancer dans une rivière. L'eau est un élément très présent dans ce film, ainsi que son effet sur la terre, l'autre élément présent en permanence, la boue dans laquelle les protagonistes tentent de se mouvoir péniblement, où les corps finissent par s'échouer, où les visages disparaissent, et même qu'un soldat mourant sombrant dans la démence finira par manger avant d'offrir sa chair à manger au personnage principal.
Le cannibalisme est également présent dans cette œuvre à la profonde désespérance il est l'ultime acte de survie auquel le personnage principal tentera de résister. Seule note d'espoir et d'optimisme dans ce film d'une extrême noirceur. Mais une noirceur presque emprunte de mélancolie et de légèreté car totalement désespérée et profondément fataliste. Se raccrocher à ce que l'on peut et toujours avancer. Car Les Feux Dans La Plaine est aussi un film sur le mouvement. Sur la progression au gré des difficultés, même si la quête est vaine.
Rarement un film n'aura autant montré l'homme confronté à la déchéance et les horreurs de manière aussi viscérale.
Magnifiquement photographié, et réalisé avec une grande maîtrise du cadrage, ce film est également un grand conte à la symbolique évidente sur l'espoir déchu et la le fatalisme de l'homme face aux éléments.