Quelle étrange impression que celle ressentie à la sortie du dernier Quentin Dupieux. Il y a des choses que j'aime chez ce réalisateur. Incontestablement. Mais il n'est pas lui faire injure d'écrire qu'ici, tout ne fonctionne pas bien. Il y a d'abord cette impression complètement contradictoire que celui-ci avait beaucoup trop de sujets à traiter pour une durée aussi courte, tout en se lançant dans des digressions n'ayant qu'un rapport lointain avec le point de départ (je pense notamment aux histoires ponctuant le récit, assez inégales, d'ailleurs). Beaucoup d'idées, de sang, de légères provocations, de réflexions souvent très pertinentes...
Malheureusement, assez peu aboutissent concrètement et autant je trouvais jusqu'ici ces formats durée très courts complètement justifiés, autant ici, je pense vraiment qu'une vingtaine, voire une trentaine de minutes supplémentaires n'auraient pas été de trop, à moins de faire d'autres choix précédemment, à l'image des récits parallèles à l'intrigue supplémentaire. Du coup, j'étais à la fois presque constamment frustré de ne pas forcément voir le film que j'attendais (ce qui peut aussi être une qualité) tout en ne voulant surtout pas que « Fumer fait tousser » s'arrête tant je ressentais qu'il avait encore beaucoup à offrir.
D'autant qu'il y a quand même de quoi trouver un minimum son bonheur : cette parodie à la fois sanglante et très attentiste des Power Rangers est savoureuse, comme cette volonté de détourner les figures habituelles en faisant de ces héros des personnages soit très autocentrés, soit fragiles, amenant des situations évidemment impensables dans une production AB (le sort réservé au méchant n'est pas en reste!), le casting réjouissant, y compris certains rôles très secondaires.
Et puis il y a ce que signifie raconter une histoire, la manière de le faire, mais aussi ce que signifie la peur, sensiblement différente selon les uns et les autres. J'aurais aimé que cela soit plus encadré, centré, développé, quitte à modifier ce vrai-faux rythme pas déplaisant et un peu bizarre, éminemment frustrant. Ce titre est peut-être celui qui fait autant ressortir les qualités que les défauts de Dupieux, auteur doué dont les libertés et ruptures narratives se retournent ici un peu contre lui. Merci toutefois à lui d'essayer de tirer le cinéma français vers l'audace, l'originalité : même si ce n'est pas toujours réussi, nul doute que les salles obscures ont intensément besoin de lui.