Auteur d’un premier essai remarqué dans le domaine de l’horreur avec Territoires, Olivier Abbou revient au cinéma après un petit crochet par la télévision et malgré les apparences, son nouveau projet vaut mieux que la relecture franchouillarde du mythique Chiens de Paille qu’on redoutait.
Ainsi, le film repose sur un postulat assez épatant et totalement inédit dans le genre : un couple en crise prête sa maison à la nounou de leur fils pour dépanner le temps des vacances et en revenant, ils découvrent que les nouveaux occupants ont changé les serrures et n’ont aucune intention de leur rendre leur bien…
Ce point de départ est porteur d’une dimension sociale qui frappe par sa justesse et qui se révèle être l’aspect le plus réussit du métrage, notamment lors de la première demi-heure qui dresse une peinture implacable de l’enfer administratif auquel sont confrontés les protagonistes.
A cela, Abbou superpose également une thématique identitaire et une réflexion sur l’intégration à travers le parcours de son héros racisé. Ce choix est particulièrement casse-gueule et ce n’est pas toujours très subtil mais le film s’en sort avec les honneurs parce qu’il prend le sujet à bras le corps et grâce à l’abattage d’Adama Niane, excellent comédien (il était déjà excellent en Guy George dans l’affaire SK1 malgré un faible temps à l’écran) malheureusement sous-exploité par le cinéma Français.
Enfin il y a les enjeux liés à la virilité et au statut victimaire du personnage principal qui s’avèrent pour le coup beaucoup plus classique.
A ce titre, on se demande si la présence de la sempiternelle bande de dégénérés psychopathes dans le récit était nécessaire tant elle ramène le film sur des sentiers balisés, parfois avec de gros sabots comme en témoigne le climax trashouille qui arrive un peu comme un cheveu sur la soupe…
Heureusement, la maîtrise technique assez sidérante de Abbou (il y a plus de cinéma dans 30 secondes de Furie que dans 1h30 de Cédric Klapish) et la photographie hallucinée de Laurent Tangy impressionnent de bout en bout, y compris lors de l’explosion de violence finale (on en profite pour dire que l’interdiction aux moins de 16 ans est un peu exagérée…).
Furie rejoint donc le cercle très fermé des films de genre Français réussis, décomplexés et qui n’ont pas à rougir devant les productions américaines du même acabit. Par ailleurs, le propos et les thèmes du film témoignent d’une réelle prise de risque qui doit être saluée !