Revu 30 ans après sa sortie (et donc après sa première vision), Furyo étonne encore pas sa singularité. Le film semble toujours en décalage avec son mouvement propre, un peu comme si son rythme interne n'était pas en phase avec son rythme narratif.
C'est d'abord inconfortable, puis on s'habitue, jusqu'à se plier à ce non-rythme. Furyo est très théâtral. On y parle beaucoup. On agit peu. Confrontation entre un Japon d'un autre temps, Empire d'honneur et de fierté, et un occident pragmatique, le film se nourrit des confrontations éthiques et culturelles du britannique Lawrence et du japonais Hara, mises en image, pour ainsi dire, comme des illustrations, par Cellier et Honoi.
Ce sont donc Tom Conti et Takeshi Kitano qui ont les premiers rôles, et non David Bowie et Ruychi Sakamoto, même si les figures charismatiques de ces derniers, êtres de chair et de sang, leurs confrontations ambigües, constituent la trame narrative du film. Ils en font d'ailleurs l'un et l'autre un peu trop, Bowie sans doute trop grimaçant, Sakamoto trop crispé, alors que le duo Conti-Kitano s'avère beaucoup plus subtil.
Top de la filmographie d'un Bowie qui n'aura jamais exploité tout son potentiel au cinéma, film ayant permis de découvrir l'immense talent musical de Sakamoto, sans aucun doute l'un des plus grands musiciens actuels, Furyo restera à jamais un film à part, le regard sans concession d'un japonais sur sa propre culture, l'œil d'Oshima.