Si il est bien un genre typiquement français aujourd’hui, c’est le film de banlieue. Il s’exploite à l’international (BAC Nord), est parfois culte pour le cinéma mondial (La Haine), et c’est même lui qui nous représente aux Oscar (Les Misérables). De ce fait, il est évident que le genre est codifié, qu’il a ses formes de prédilections (drame, western, comédie, etc.), son imagerie et ses acteurs. Autant dire que lorsque j’entends parler de Gagarine, drame en banlieue, certes, mais adoptant une imagerie SF, je suis plutôt intéressé. Cette idée de premier film français prenant un concept et le détournant dans une esthétique inhabituelle m’a en cela rappelé Slalom, sorti plutôt dans l’année, plaçant le concept de drame féministe dans le milieu du ski de façon brillante. Mais donc, Gagarine. L’imagerie spatiale entourant le long-métrage a un effet particulier sur sa dramaturgie, lui donnant un aspect poétique qui l’atténue en même temps qu’il l’aggrave, lorsque le réel prend le dessus, ou au contraire lorsqu’il se devine derrière un symbolisme assez fort (stupéfiante scène finale). Tout cela est renforcé par des comédiens brillants, en particulier Lyna Khoudri, très touchante, ainsi que Finnegan Oldfield, que je suis très content de revoir après le très réussi Nocturama, de Bertrand Bonnello. Et si l’on ajoute à cela une musique aussi réussie que bien intégrée à la mise en scène, on obtient ce qui est à n’en pas douter un des meilleurs films de l’année 2021, et j’ai assez hâte de découvrir la suite du travail des deux réalisateurs.