Le premier long-métrage de fiction de Philippe Lesage, Les démons, après plusieurs documentaires, ne laissait pas planer le doute quant aux qualités de mise en scène de son auteur même si le film n'était pas des plus convaincants. Genèse, qui ne plaira pas à tout le monde, ce qui n'est pas forcément mauvais signe, se singularise par des choix narratifs très forts même si déconcertants avec un épilogue qui n'a rien à voir avec ses deux intrigues principales, si ce n'est qu'il y est question de la découverte du sentiment amoureux. Ce dénouement est plutôt optimiste et innocent et contraste avec le reste du film, beaucoup plus nuancé, voire sombre. Deux récits non sans rapport, puisque concernant un frère et sa soeur, poursuivent leur cours en parallèle, avec une fluidité exceptionnelle où la mise en scène et surtout l'art du découpage et la maîtrise temporelle de Lesage font merveille. Hormis le fait que le cinéaste s'appuie un peu trop sur son excellente B.O, petit travers qui le rapproche de son compatriote Dolan, le film réussit à rendre électrisant un scénario somme toute banal à base d'hésitations sentimentales et de tourments adolescents. Il faut bien que Genèse se passe, y compris dans la douleur, l'humiliation, le rejet ou la déréliction. Mais cette chronique n'est pas pour autant plombée par trop de noirceur, cadencée par la musique, donc, et remarquable dans deux ou trois scènes d'épiphanie dont une lors d'un exposé en classe. L'humour et l'ironie ne sont pas non plus absents de Genèse et accompagnent ces battements de coeur erratiques et souvent synonymes de déception au contraire de l'amitié, quoique. Le film mêle grâce et gravité avec deux interprètes admirablement dirigés : Théodore Pellerin et Noée Abita, l'héroïne d'Ava, laquelle devrait faire une belle carrière si de vilains prédateurs ne la mangent pas. Tomber amoureux ne s'explique pas et l'être de Genèse est un sentiment finalement très personnel qui n'a pas besoin d'être commenté plus avant.