Goliath aborde son film sans prétention, ne prétendant a aucuns moments révolutionner le genre du film d'investigation. Si la forme est des plus classiques, on sent que c'est pour se concentrer sur son sujet principal.
La ou le film marque des points, c'est qu'il fait preuve d'une véritable lecture d'actualité en touchant au mieux son publique : les français et plus précisément le monde rurale touché dûment par les scandales sanitaires liés aux produits chimiques dans l'agriculture.
Le choix d'un triptyque de personnages est judicieux. Les trois acteurs campent avec justesse des camps bien différents de cette histoire : Lellouche est l'avocat un poil dépressif mais profondement humain et brave, Niney campe le rôle du lobbyiste cynique a souhait et enfin Emmanuelle Bercot que je trouve être la grande réussite du film incarne la militante d'un monde rurale trop facilement oublié.
Sur le rythme du film, rien a redire. Les scènes s'enchainent bien, alternant avec fluidité sur le monde politique croulant sous l'influence très bien dépeint des cabinets de relations publiques et le monde agricole bouleversé au plus profond de sa chair par l'impact désastreux des pesticides.
La ou le film pose problème c'est dans la sur-théâtralisation de nombreuses scènes. On est souvent dans le surdosage émotionnel et dans la surenchère dramatique ce qui nuit profondément à la sensation réelle du récit. C'est dommage car cela vient presque annihiler tout le travail fait en amont pour nous plonger au mieux dans les coulisses de la politique française et Européenne et dans les coulisses de la sphère médiatique.
Autre point bloquant, c'est que le film est parfois infantilisant. Les filtres glacés pour les lieux "bureaucratiques Parisiens" vs les filtres chauds à la campagne, les méchants parlementaires vs les gentils militants ecologiques. On aurait aimé un peu moins de manichéisme au profit d'un film plus mature quitte a choquer la bien pensance de nombreux spectateurs.
On sort malgré tout de la séance satisfait devant un film qui parle d'un sujet brulant et qui nous questionne réellement sur la productivité imposée par les firmes agroalimentaires pour des profits toujours plus élevés au grand damne des agriculteurs. Le cynisme du film n'empêchera pas le spectateur avisé de se demander si vraiment, on pourrait pas aller au bout de la demarche et trouver le grand coupable qui est la mondialisation incarnée par l'UE et Bruxelles et sa politique productiviste complètement irraisonnée.
En tâtant la morale politique, Goliath ne décroche qu'une semi morale, celle qu'on voit venir rapidement mais qui est pourtant nécessaire. Le film fait donc son devoir de lanceur d'alerte sans pour autant s'égratigner a avoir une véritable opinion sur le sujet, restant timidement en retrait pour éviter toute récupération politique en cette période électorale. On sent que Bac Nord a laissé des traces ...