Pour son troisième film, François Ozon reprend une pièce que Werner Rainer Fassbinder a écrite, mais n'a jamais joué. Elle représente quelque part un ménage à quatre d'une grande perversité.
Un homme d'une cinquantaine d'années amène un jeune homme chez lui. Bien que ce dernier doit se marier avec sa petite amie, il se met à brûler de passion pour ce représentant de commerce, joué par Bernard Giraudeau. Les mois passent, le couple masculin vit ensemble, mais le jeune homme, Malik Zidi, se sent frustré de n'être qu'une potiche, et souhaite aspirer à plus de liberté, ce que son compagnon lui refuse, au point qu'il en est excédé. C'est pendant une absence de Giraudeau que va revenir dans la vie de Malik Zidi son ancienne petite amie, Ludivine Sagnier, puis l'ex-compagnon du premier, qui a changé de sexe pour devenir une femme (Anna Thomson). Entre eux quatre va se produire un mélange explosif.
C'est toujours sous l’œil du type qui scrute par l'entrebâillement que François Ozon regarde ces couples divers et multiples, et ces existences exploser, dans une histoire qui est située en Allemagne dans les années 1970. On y parle de Deutschmark et des chansons du même cru, mais ça passe très bien à l'écran, car la mise en scène se veut proche d'une pièce de théatre. D'ailleurs, le film est découpé comme tel, avec quatre actes, seulement quatre acteurs, et le tout intégralement en studio. D'où le côté factice qui se dégage des décors, mais aussi de ces personnages vraiment improbables, où Ludivine Sagnier se joint à Giraudeau et Thomson pour une partie à trois, à peine connait-elle cet homme. Mais ce quatuor est vraiment très bien, avec une mention spéciale à Bernard Giraudeau qui semble né pour jouer la perversité ; il a un regard en biais qui fait froid dans le dos. D'ailleurs, c'est amusant de voir aussi cette pauvre Sagnier tourner autant de fois à poil dans ces films à l'époque, mais il faut dire que non seulement elle est très belle, mais qu'elle a un petit côté ingénu qui la rend au fond mystérieuse. Comme le sont au fond tous les personnages, mais c'est ça qui rend Gouttes d'eau sur pierres brûlantes si particulier, car c'est de son minimalisme que sort sa bizarrerie. Et comme souvent chez François Ozon, on n'en sort pas indifférent.