Le Noël consumériste et consensuel vous emmerde. Le gentil E.T. de Spielberg vous insupporte. Vous détestez vos voisins. Vous exécrez les vieilles radines acariâtres, les shérifs alcooliques et les étrangers. Vous abhorrez les chiens et les chats. Gremlins est fait pour vous.
Un inventeur farfelu cherche un cadeau original pour Billy (Zach Galligan), son grand dadais de fils. Son choix se porte sur un mogwaï, un petit animal aux trois contre-indications formelles : « Tu ne l’exposeras pas à la lumière. Tu ne le mouilleras pas. Tu ne le nourriras pas après minuit. » Billy s’empresse de les transgresser et le doux pelucheux cède la place à une cohorte de gremlins malfaisants. Joe Dante ose l’impensable, l’oxymorique comédie-familiale-horrifique. Le producteur Spielberg recadre le projet initial, qui voyait la courageuse maman décapitée, le chien bouloté et les gremlins prendre d’assaut le McDonald’s, dévorant clients et burgers.
Billy est pâlichon et sa copine gentillette, le seul intérêt du film réside dans la horde de gremlins. Vous apprécierez les séquences « cultes » du bar et du cinéma, quand la caméra de Joe Dante s’attarde, avec gourmandise, sur les gueules sarcastiques des animatroniques à grandes oreilles. Le gremlin est un sale gosse, teigneux, vindicatif et rancunier. Le gremlin fume et boit, se défoule au poker et se goinfre de bouffe grasse, joue avec le feu et les armes à feu. Il saccage, casse, pille. Le gremlin ne respecte rien, rien ne lui est sacré. Nihiliste grimaçant, il se rit de nos peurs ancestrales. La police a fui. Terrifiés, les honnêtes citoyens se terrent, la ville est ouverte, magasins de jouets et supermarchés sont offerts au pillage. Attila, Gengis Khan et Tamerlan sont de retour et se divertissent. Que la fête commence !
PS. Nous devons l’entrée en littérature des grimlins à Roald Dahl. L’ancien pilote de chasse décrivit ces facétieux et déroutant lutins, auxquels les superstitieux aviateurs de sa Majesté attribuaient les avaries de leurs appareils.