Here – Les plus belles années de notre vie par Gonzo78

Here... there ... And everywhere...


Massacré par la critique américaine, flop complet au Box-office, je dois avouer que le dernier film de Robert Zemeckis ne m'inspirait guère... Ses derniers films étaient plutôt mineurs , c'est vrai... Mais pas non plus les navets décrits par une critique U.S., visiblement et incompréhensiblement très remontée contre le réalisateur de "Forrest Gump".

Pour s'en convaincre, il suffit de regarder "Bienvenue à Marwen", film de 2018 sur la la folie douce décrivant un de ces personnages laissés pour compte dont Zemeckis fait le portrait déchirant. Le tout, en utilisant sa maestria technique dans une mise en scène inventive, toujours au centre de ses expérimentations ("Retour vers le futur", "Qui veut la peau de Roger Rabbit?", "Forrest Gump ", etc...)

Qu'en est-il de"Here", sous titré (bêtement) en France les plus belles années de notre vie ?

Eh bien... Comment décrire en quelques mots, le tourbillon de sentiments qui m'a emporté à la vision de ce film ? Car oui, non seulement, le film n'est pas la catastrophe attendue, mais en plus, c'est l'un des plus beaux et émouvants qu'il m'ait été donné de voir ces dernières années...

Adapté d'un roman graphique de Richard McGuire, le film réunit toute l'équipe de "Forrest Gump"... Le réalisateur, bien sûr... Mais aussi les acteurs Tom Hanks et Robin Wright, le scénariste, Eric Roth, le composteur Alan Silvestri et le chef opérateur, Don Burgess...

L'ambition du film, c'est de reprendre le concept de la Bande dessinée qui en est à l'origine... Raconter rien de moins que l'histoire de l'humanité à travers un unique lieu qui va voir défiler une nature naissante (des images numériques mais d'une saisissante beauté) puis des êtres humains. Car c'est bien cela qui intéresse Zemeckis... L'être humain et son évolution dans un espace donné et dans un temps donné...

Depuis ses débuts, c'est souvent sa marotte... Déjà au centre de "retour vers le futur"( les voyages et les paradoxes de Marty entre 1955, 1985 et 2015), de "Seul au Monde" (Chuck Noland, le voyageur/naufragé perdu, confronté à un espace réduit où il doit survivre pendant quatre ans), du mésestimé et pourtant merveilleux "Contact" (Ellie Harroway, et son voyage interstellaire et "instantané" à travers le temps et l'espace qui paraît n'être finalement qu'une illusion )...

L'illusion, justement, du temps qui passe pour laisser la place à l'immuabilité de toute chose... Car le temps n'a pas de prise sur ce que nous laissons d'après Zemeckis... Ce n'est finalement qu'un moment volé à l'éternité...

Comment finalement ne pas évoquer "Forrest Gump", et son émouvante vision de l'Histoire sous le regard de son héros candide?

"Here" en est son parfait négatif tout en en reprenant le principe. Forrest Gump partait de l'intime pour raconter l'histoire américaine ; ici, c'est bien l'histoire qui finit par fabriquer l'intimité des êtres . Et cette histoire prend vie sous nos yeux à travers ce lieu unique où le réalisateur a décidé de planter sa caméra... Derrière cette vignette fixe et qui semble éternelle (écho de son matériau d'inspiration, la bande dessinée), la grande Histoire se déroule et Zemeckis tisse dans sa périphérie les fils de vies qui se répondent et qui s'avèrent finalement complémentaires... Des dinosaures anéantis rapidement par l'astéroïde à l'origine de leur extinction.... Puis l'arrivée des premiers êtres humains... Un couple d'amérindiens... Une bâtisse coloniale qui se construit et où on commence à voir défiler des personnages dont le fils de Benjamin Franklin...

Comme souvent chez Zemeckis, la grande Histoire rejoint la petite...

Ce voyage dans le temps auquel nous convie encore une fois Robert Zemeckis, se focalise alors sur la vie dans cette maison qui apparaît... Et ce salon où vont évoluer les générations de cette famille au cœur du récit ... Avec toute sa maestria et sans jamais perdre le spectateur, le réalisateur montre des instants de vie qui se font écho dans le temps quelquefois de manière non linéaire, mais unis par une volonté de faire naître l'émotion... Les événements se succèdent alors dans la vie de ces différentes familles... Naissances, mariages, maladies, deuils... "Installé" dans ce salon et ce quotidien qui nous apparaissent très vite familiers, le spectateur partage les joies et les peines des personnages aidé par l'interprétation juste des comédiens.

Techniquement, le film est bluffant... Jamais le deaging n'a été utilisé avec autant de réussite. Même en gros plans...

Paul Bettany et Kelly Reilly(quinze ans plus jeunes ...) sont les parents de Tom Hanks et Robin Wright et nous n'en doutons pas une seule seconde...

Chaque personnage évolue dans cette lucarne et voit défiler (la télévision omniprésente le montrant) les époques et les péripéties somme toute banales de la famille Young (même le nom est évocateur...).

Mais, à y regarder de plus près... N'est-ce pas de cette banalité que naît l'universalité ?

Et finalement, cette phrase que se plaisent à répéter les protagonistes "Time files..." résonne comme une évidence au regard de ces vies qui passent inexorablement sous nos yeux émerveillés par la justesse du constat... Un peu comme la plume qui ouvrait et fermait le récit dans Forrest Gump, un oiseau vient clore le récit dans l'unique (mais si virtuose) mouvement de caméra du film .... L'émotion peut alors nous submerger ...

Oui .... Vraiment... Robert Zemeckis est un merveilleux metteur en scène qui vient de nous offrir l'un de ses plus beaux films...

Gonzo78
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il y a 6 jours

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