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Réflexion troublante sur la notion de consentement

Le titre n'est guère engageant et implique de passer outre quelques a priori. Aussi le spectateur s'attend-t-il, au mieux, à visionner un divertissement largement inspiré de Projet X, ou, au pire, à recevoir des conseils pour réussir à pécho. Pourtant, loin des caricatures, How to have sex pose une réflexion troublante sur la notion de consentement et interroge avec subtilité la complexité du désir féminin.


La réalisatrice Molly Walker, dont How to have sex est le premier long-métrage, retrace le quotidien de trois adolescentes, Skye, Em, et Tara, parties passer leurs vacances dans une station balnéaire en Crête. Pour célébrer la fin du lycée, le trio enchaîne les soirées pendant cinq jours. Les premières scènes donnent à voir l'ensemble de la bande, au sein de laquelle chaque fille est assénée à un un rôle bien défini. Skye, la plus âgée, jouée par Lara Peake, est déjà très sûre d'elle ; Em, jouée par Enva Lewis, sait qu'elle est attirée par les filles et se destine à de longues études. Le personnage de Tara, joué par Mia McKenna-Bruce, l'actrice principale, est plus énigmatique : d'apparence exaltée, enthousiaste et rigolarde, le spectateur lui découvre une personnalité timide et hésitante au fil des scènes. On comprend non sans un certain malaise que, pour Tara, le séjour en Crète fait office de "rite d'initiation" : contrairement à son amie Skye, Tara n'a que peu d'expériences auprès des garçons. Le séjour présente pour la jeune fille l'occasion de se “connaître davantage” en perdant sa virginité.


La réussite de "How to have sex" tient selon moi davantage à la représentation des scènes de fête, à travers la pertinence des choix esthétiques qu'opère la réalisatrice, qu'à la qualité du scénario - les évènements s'enchaînant de manière assez linéaire et prévisible à l'écran. À la manière d'un documentaire, la réalisatrice Molly Walker représente de manière brute le déroulement des soirées auxquelles les filles s'adonnent chaque soir. L'intensité de la foule, le rythme de la musique, les couleurs des néons de boîte de nuit sont autant d'ingrédients très travaillés par Molly Walker afin de retranscrire le plus fidèlement possible à l'écran l'euphorie qui caractérise le séjour des trois filles en Crète. Dans une seconde partie, le désenchantement opère : la fièvre collective laisse place à une ambiance de chaos, voire de débauche, palpable à travers la posture des festivaliers et l'omniprésence des ordures qui jonchent le sol de la ville de jour comme de nuit. Mais la réussite des scènes collectives tient aussi et surtout aux plans fixes et resserrés sur la posture et le visage de Tara qui, non loin de festivaliers, sera victime d'agressions sexuelles à plusieurs reprises. La scène du viol est particulièrement glaçante. Lors d'une virée à la plage avec un garçon d'une chambre voisine de l'hôtel, Tara peine à trouver les mots justes pour refuser la proposition du jeune homme et se livre à un rapport sexuel qu'elle ne désire pas. Molly Walker saisit alors avec beaucoup de justesse toute l'ambiguïté de la communication non-verbale qui précède le viol subi par Tara - et autour de laquelle se noue la problématique de la zone grise du consentement.


Si chaque homme qui s'approche de Tara finit par paraître suspect aux yeux du spectateur, le comportement des filles n’est pas dépeint sans une certaine ambivalence par la réalisatrice. Dès lors, la force de How to have sex est peut-être constitutive de ce qui fait sa fragilité : Molly Walker ne porte pas de regard clair et n'affiche aucune condamnation sur l'agression subie par Tara. Plus qu'elle ne condamne les pratiques de son agresseur, la réalisatrice semble surtout questionner le rapport qu'entretiennent les jeunes filles à leur sexualité et ne dénonce qu’en ligne de crête l’omerta régnant autour des violences sexuelles et les traces que laissent celles-ci dans le passage à l'âge adulte.

AnneHostein
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le 13 déc. 2023

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Anne Hostein

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