La vie est une fête
La fête est le cinéma
Le cinéma est la vie.
Huit et demi a la puissance des mondes qui s’ouvrent, cette puissance et cette beauté qu’une loi physique donne à celui qui la découvre et à ceux qui regardent désormais le monde avec - la gravitation de Newton ou les 3 lois de Kepler - ce tournis qu’a un moteur qui fonctionnait précédemment avec 2 chevaux au moment où il passe à 300 chevaux vapeur. L’esprit est grisé même de cet alcool nouveau.
Même ou grâce à la dépression, au vide ou à sa peur, une peur si vive qu’elle finit par trouver une porte qui s’ouvre au fond et la maintient ouverte, regardant dans les deux directions, joignant ce que précédemment on jugeait contraire : la joie de vivre et la dépression, le réel documenté et le délire du fantasme, l’intime le plus privé et le spectacle le plus exubérant, l’hypocrisie éhontée, le mensonge perpétuel et l’honnêteté, le désir de vérité, tout cela n’est plus qu’une seule matière, explosive, de joie créative tenue par de nouvelles solutions au problème humain. La vie, l’esprit, le cinéma. Ni plus, ni moins.
Invention perpétuelle du jeu, gestuelle des acteurs condensée entre personnage (tendance Sandra Milo et ses « Sgulp ! » , sa démarche chaloupée et son coup de poing amical) et personne (tendance Luisa), parfois réunis (la réconciliation merveilleuse et rêvée !), entre caricature et saisie d’un détail véridique, expression de leur mouvement profond permanent et de leur état momentané. Fluidité du mouvement et des lumières pour chanter que la fête, c’est bien l’esprit qui reconquiert son droit à créer, à penser, à respirer, à aimer ce qui l’entoure. Il le reconquiert en se resourçant d’une part à l’enfance (cure de capacité d’amour) : « Tu ne sais pas aimer » dit trois fois la Source par la voix de Claudia, d’autre part au rêve, celui qu’une fusée nous donne car même si elle reste à terre, Fellini vient de trouver pour les restants de ses jours de cinéaste la loi qui permet de s’extraire de l’attraction terrestre, la vitesse de libération.
Au sens littéral, le plus grand film catholique jamais fait. Tourbillon dépressif, cyclothymique.
Revu 12 et 18 sept. 2019 (DCP)
Revu 29.12.2020 (ordinateur)