La magie selon Sergio Leone
"Il était une fois en Amérique". Tout a déjà été dit sur ce film. Toutes ses qualités, ses rares voire très rares défauts. Rien n'est à ajouter. Et puis, il faut voir le film pour le croire. Certains diront peut-être que 10 est exagéré ce à quoi je répondrai :
+2 pour la mise en scène. Sergio Leone a progressé depuis ses mythiques westerns spaghettis et perfectionne à son paroxysme sa façon si singulière de filmer l'action, de dérouler l'histoire sous nos yeux ébahis devant tant de talent, d'habileté avec la caméra. Comme quoi des plans fixes peuvent installer une tension si dense qu'elle en devient palpable, où le spectateur devant la simplicité même de la scène, de l'action s'imagine tous les scénarios possibles et imaginables sans pour autant être sûr à aucun moment de la conclusion de la situation. Des regards, des zooms en gros plans, des plans larges : la quintessence du cinéma nous est offerte par le réalisateur qui a une maîtrise absolue de son art.
+2 pour l'histoire. Car si certains peuvent tenir un film de plus de trois heures avec un scénario des plus basiques, M. Sergio Leone nous raconte une histoire complexe aux différents rebondissements qui s'étale sur plus de 40 ans de vie dans le milieu très particulier du banditisme. Les héros grandissent et nous avec, nous comprenons les changements de comportement, les différents choix qu'ils font, sans jamais les juger, sans jamais être déçu. Ainsi sans être inabordable, l'histoire oblige à la réflexion, aborde la violence d'un milieu dont s'est la principale caractéristique en distillant une certaine poésie, alliant des scènes parfois insoutenables (comme celle de la voiture et du viol d'Elizabeth McGovern) à des scènes de franche camaraderie et même d'amour fraternel entre les différents protagonistes principaux. Juste la meilleure histoire de gangsters qu'il m'ait été donné de voir.
+1 pour les personnages. Avec l'histoire, chaque personnage se révèle intéressant et surtout indispensable au récit. Chacune de ses actions est importante et sans lui, l'histoire ne peut progresser. Tous ont leurs particularités, sans verser dans la caricature, chacun est différent comme un véritable groupe d'amis, comme on en retrouve partout dans notre entourage et en cela, ils font partie de notre cercle de proches sans jamais s'éloigner, on se surprend à aimer ces malfrats, à rire de leurs blagues, à adopter leur style de vie le temps des 3h40 de film. Ils sont bels et biens réels. Bref, ce sont nos amis.
+1 pour le casting complet. Car réduire le film à un Robert De Niro au sommet de son art certes serait vraiment très réducteur. Tout le casting, adulte et enfant est simplement parfait, sublime grâce à la maîtrise d'acteur de Sergio Leone. Comment faire d'un casting aussi vaste quelque chose de cohérent, sans justement devenir anecdotique. Car oui, chaque personnage a sa propre essence et donc chaque acteur a réussi à s'en imprégner, tant et si bien, qu'on a même l'impression qu'il est devenu ce personnage. C'est-à-dire qu'à chaque fois qu'on pense à tel ou tel acteur du casting, on se retrouve avec l'image persistante dans la tête du personnage qu'il joue dans le film. Les rôles leur collent à la peau, parfaitement et cela pour notre plus grand plaisir.
+2 pour la musique. Ennio Morricone exceptionnel tout simplement. Compositeur attitré de Sergio Leone, il déverse tout son talent avec une justesse exceptionnelle pour retirer de chaque scène le meilleur et ne fait pas que souligner mais intègre complètement la mise en scène et l'histoire. C'est assez rare pour le dire. Bref, que dire d'autre que bravo à l'un des meilleurs compositeurs de musiques de films pour une prestation une fois de plus parfaitement adaptée à une histoire comme on n'en fait pas tous les jours.
+2 pour la dernière scène du groupe d'amis enfants courant sur les quais de New-York et cette scène au ralenti tout ce qu'il y a de plus poignante. La fin d'une ère, le passage à l'âge adulte, à la fois lent de par l'image et rapide de par l'espace temps qui n'est que de quelques secondes : comme s'il suffisait d'un évènement, aussi bref fut-il, pour faire d'un garçon plein d'ambition et d'avenir, un homme qui doit faire face à son destin, prendre ses responsabilités et finalement, s'apercevoir que tout peut-être gâché très facilement, trop même. Une image de cinéma qui restera gravée dans ma mémoire et que je reverrai assurément.