Once upon a time, in an nazi-occupied France...
Un chef-d’œuvre, que dis-je, le chef-d’œuvre, voilà ce qu'est pour moi Inglourious Basterds, et j'aimerais que cette critique soit un immense cri du cœur à la hauteur de la passion que je voue à ce film. Cette œuvre a atteint la perfection, ça ne fait aucun doute, mais pour moi elle va encore au-delà de cette perfection froide et impersonnelle dont certains films sont dotés. Je vais tenter de soulever les éléments qui provoquent mon adoration pour cette œuvre, afin d'essayer de déterminer la provenance de cette fascination.
“Je suis sans pitié, sans scrupule, sans compassion, sans indulgence, pas sans intelligence.”
C'est on ne peut plus juste. Quentin Tarantino a su, par cette simple phrase, cerner et définir non seulement sa personne, mais également ses œuvres. Il est pour moi un génie, je suis heureuse que son cinéma ait marqué les mémoires et j'espère qu'il les marquera encore pour longtemps. Dans Inglourious Basterds, il laisse son style influer pour un film que beaucoup ne comprendront pas, mais dans lequel beaucoup d'autres reconnaitront le QT qu'ils veulent voir.
Je pourrais chanter les louanges du scénario d'Inglourious Basterds un bon bout de temps, en expliquant en détail comment le réalisateur utilise avec pertinence chacun de ses personnages afin de dérouler une trame accrocheuse et intelligente. Mais le plus marquant reste encore la façon dont cette intrigue est repartie entre les scènes, toutes mémorables.
La scène d'introduction, par exemple, est remarquable. L'atmosphère tendue, oppressante et suffocante est accentuée par un fond sonore pertinent, alternant entre morceaux issus de l'excellente bande-originale et silences pesants. C'est sans compter sur le jeu d'acteur de Christoph Waltz, qui montre ici toute l'étendue de son talent dans le meilleur rôle de sa carrière. On retrouvera la tension de cette terrible scène à un autre moment du film, à savoir celle du bistrot. Chargée d'une ambiance toujours aussi bien maitrisée, cette scène voit se dérouler un affrontement froid et inquiétant de prime abord, puis sanglant et violent par la suite. Cette atmosphère variera en fonction des scènes et des personnages, elle passera d'un humour noir réussi à une atmosphère pesante en passant par du spectaculaire, et ce sans jamais perdre de son intensité.
Inglourious Basterds est donc servi par un scénario impeccable, souligné par la narration adroite de Quentin Tarantino, le tout saupoudré des répliques cultes dont le monsieur nous régale à chaque nouvelle œuvre.
Oooh, that's a bingo ! Is that the way you say it ? "That's a bingo ?"
- You just say "bingo."
- Bingo ! How fun !
Je m'en voudrais d'oublier la réalisation de Tarantino : elle est ici magistrale, remarquablement efficace, chaque plan est savoureux. Il sait utiliser la caméra pour souligner chaque moment de tension, chaque échange, chaque événement, et le tout avec brio.
You'll be shot for this !
- Nah, I don't think so. More like chewed out. I've been chewed out before.
Des personnages inoubliables
Que sont des répliques délicieuses si elles ne sont pas desservies par de bons acteurs, et surtout des personnages forts ? Inglourious Basterds bénéficie de ces deux avantages : des protagonistes marquants franchement bien interprétés.
Brad Pitt is Aldo the Apache
Le lieutenant Aldo Raine est sans doute l'un des meilleurs rôles de l'acteur : porteur d'un charisme éblouissant, il enchaine les répliques cinglantes avec classe...
I'm gonna give you a little somethin' you can't take off.
...force...
And I want my scalps !
...et désinvolture.
But your status as a Nazi killer is still amateur. We all come here to see if you wanna go pro.
Christoph Waltz is the Jew Hunter
Voici pour moi le meilleur antagoniste jamais créé, et le meilleur rôle Waltz, sans conteste. Son personnage est tout simplement excellent : manipulateur, cruel et brillant, il est parfait, et plus encore. Je vous parlais de charisme tout à l'heure, en mentionnant Aldo Raine : Hans Landa est mille fois au-dessus de ça. Christoph Waltz est sidérant tant son jeu est admirable, il donne un véritable souffle au personnage et en devient indissociable.
What a tremendously hostile world that a rat must endure. Yet not only does he survive, he thrives. Because our little foe has an instinct for survival and preservation second to none... And that, Monsieur, is what a Jew shares with a rat.
Il est terrifiant, tant par son intelligence que par son pragmatisme, et il est rare qu'on apprécie tant de voir un personnage à l'écran, qui plus est un antagoniste sans pitié.
AU REVOIR, SHOSANNA !
Mélanie Laurent is the Jewish Vengeance
Tarantino préférant privilégier une certaine logique dans le choix de ses acteurs par rapport à leurs personnages, Mélanie Laurent interprète ici la française Shosanna Dreyfus, "visage de la vengeance juive". L'actrice livre une performance satisfaisante et naturelle qui convient parfaitement au personnage.
Who wants to send a message to Germany?
- I have a message for Germany. That you are all going to die. And I want you to look deep into the face of the Jew that is going to do it !
Shosanna est un personnage clé et un personnage fort, représentante de la vengeance que Tarantino aime tant dépeindre dans ses films, et Laurent parvient, avec un charme qu'on ne lui soupçonnait pas, à lui donner de la crédibilité.
My name is Shosanna Dreyfus and THIS is the face... of Jewish vengeance !
Un côté "film choral" bien exploité
Et ce car il reste une multitude de protagonistes et d'interprètes à citer, et que certains personnages du film ne se sont jamais croisés. Parmi eux, je mentionnerais Diane Kruger dans le rôle de la belle Bridget Von Hammersmark, Daniel Brühl interprète du soldat Frederick Zoller, personnage gonflé d'orgueil, ainsi que Michael Fassbender dans le rôle du lieutenant Archie Hicox. C'est sans oublier les basterds Eli Roth (Donny Donowitz) et Til Schweiger (Hugo Stiglitz). J'en oublie sûrement encore, mais le dernier nom que j'aimerais donner est celui d'Adolf Hitler : la représentation faite du Fürher est très significative du message que QT veut transmettre à travers son œuvre. Alors qu'Hitler est la parfaite incarnation de la terreur et de la cruauté, il est ici humilié et tourné en ridicule à travers un personnage qu'on pourrait qualifier de niais et stupide.
NEIN, NEIN, NEIN, NEIN, NEIN, NEIN!
Il n'y a rien d'étonnant dans l'idée qu'Inglourious Basterds se moque d'Hitler car, en y regardant mieux, c'est également avec dérision que tout le IIIe Reich est représenté. Quentin Tarantino avait décidé, n'en déplaise à quelques haters incapables de comprendre la notion de fiction inspirée de faits réels, de réécrire l'histoire à sa manière, et s'attaquer à la Seconde Guerre Mondiale était un pari osé. Habituellement dépeinte par le biais de drames décrivant l'enfer des camps de concentration, elle est devenue au cinéma le symbole d'un conflit meurtrier et d'un génocide cruel. Mais QT n'est pas connu pour être conformiste, et il livre ici une œuvre qui s'appuie sur un sujet traité et retraité, mais qui pourtant apporte une innovation au genre de films de guerre. Inglourious Basterds est parfait d'un point de vue technique, scénaristique et narratif, mais pas que. Inglourious Basterds est surtout une révolution, un cri du cœur appelant à la vengeance et à la justice, une véritable claque de laquelle on peine à se remettre, et un chef-d’œuvre ultime pour le meilleur cinéaste que le 7e art ait connu.
You know somethin', Utivich ? I think this just might be my masterpiece !