Il s'est passé deux événements majeurs en Angleterre au mois d'octobre 1962 : la parution du premier 45T des Beatles ("Love me Do") et la sortie de James Bond 007 contre Dr. No.
"Love me Do" n'est certes pas la meilleure chanson des Beatles et Dr. No n'est pas non plus le meilleur "James Bond", mais dans les deux cas, l'objet est fondamental.
Dr. No est un petit film indépendant au budget moyen et sans stars. Mais l'exotisme, l'érotisme (carré blanc pour la diffusion tévé en France - si si), l'humour et la violence proposés pour l'époque ont créé un cocktail détonant dont les répercussions ont influencé le cinéma de manière indélébile. Prenez par exemple cette manière - si banale aujourd'hui - qu'a 007 de sortir un commentaire comique, ou à défaut ironique, après chaque scène musclée. On retrouve ça dans des kilos de films aujourd'hui et ce n'est pas Bruce Willis, Mel Gibson, Luc Besson, etc.... qui diront le contraire. De film indépendant, "James Bond" est devenu une série de films de plus en plus excessifs, jusqu'à la nausée (Pierce Brosnan) un peu comme les STAR WARS quelques années plus tard. Mais finalement, beaucoup ont été influencé par les aventures de 007, soit directement, soit par opposition, de la même manière que tout le monde l'a été par les Beatles dans la pop.
"Les gens m'appelaient Bond dans la rue. Impossible d'éviter les mouvements de foule désordonnés et les flashes aveuglants. Les Beatles, eux aussi, se sont trouvés dans une telle tornade, mais ils étaient quatre pour la supporter !" (Sean Connery)
Tout le charme de ce film réside dans son côté vintage (le "dragon" qui hante Crab Key est du plus haut grotesque) mais c'est ce qui en fait le charme. Ursula Andress sortant de l'eau turquoise a marqué des générations de spectateurs et qu'importe si son jeu laisse parfois à désirer. Le film étant une série B, on se fiche de la perfection et c'est son honnêteté qui lui donne une liberté de ton qui ne gêne personne. D'autre part, si l'on est bien attentif, on remarquera également que Bond est plus dragué qu'il ne drague lui-même dans ce premier film (Sylvia Trench, la réceptionniste de l'hôtel, la secrétaire du Pr. Dent) et finalement il n'est pas particulièrement macho ; ce qui changera dès le film suivant.
James Bond 007 contre Dr. No est le premier "Bond", c'est celui de la découverte, celui qui pose la plupart les bases de toute la série, et par extension, du cinéma (et de la tévé) d'action. Car en effet, sans le savoir, Saltzman & Broccoli ont inventé en 1962 un nouveau genre cinématographique : le film d'action. Il manque encore les gadgets et la musique de John Barry, qui n'est ici présent que pour arranger et interpréter l'incontournable thème principal de Monty Norman qui ne ressemblait à rien à l'origine, mais tout cela se développera très rapidement dans les deux films suivants.