Je verrai toujours vos visages met en lumière la justice restaurative. Une pratique encore trop peu connue en France. Je ne suis pas renseigné suffisamment à ce sujet, elle semble encore un poil trop récente. C'est ce sujet que met sur la table Jeanne Herry, après les difficultés du monde de l'adoption dans Pupille. Le long-métrage, ici, met en exergue un pan magnifique de notre société. Être capable, même dans l'horreur et la révulsion absolue que les victimes ont pour leurs bourreaux, de reconnecter les humains, seulement avec la parole.
Pour se faire l'histoire explore un double versant : Au sein d'une prison - pour un groupe entier - ainsi qu'en dehors (arc autour du personnage d'Adèle Exarchopoulos). Et pour la faire brève, il est impossible de ne pas apprécier Je verrai toujours vos visages tant les dialoguistes ont fait et surtout accompli un travail de perfection. Aucune intervention n'est surfaite, ne semble romancée, ne semble vouée à faire avancer une histoire quelconque. Les échanges sont limpides, honnêtes, presque comme si nous étions face à un docu-fiction. Je suis impressionné par le sens du cadre de Jeanne Herry, qui parvient à transformer cette salle d'échange en un dixième personnage, qui semble surveiller tous ces êtres cassés d'un peu plus haut.
Je suis encore plus ébahi par le jeu flippant de maîtrise d'Adèle Exarchopoulos qui mérite cent fois son César et qui éclabousse ce film par son talent. On est devant un film qui doit faire date, qui doit être présenté dans les prisons, qui doit être montré pour sensibiliser le plus grand nombre. C'est important, capital et essentiel. Une leçon humaniste qui doit, à bien des égards, donner des sueurs froides aux partisans d'une haine de tous contre tous.