Le western "Jeremiah Johnson" de Sidney Pollack raconte, sous la forme d'une ballade, la légende d'un homme qui a fui la civilisation pour vivre dans la montagne une vie de trappeur solitaire autour des années 1850.
Au-delà de la vie et des aventures de Jeremiah Johnson, c'est surtout une ode à une nature sauvage avec qui "on ne triche pas car la montagne gagne toujours".
La vie dans la montagne est semée de difficultés et on ne s'y improvise pas montagnard du jour au lendemain. Le film raconte donc le voyage initiatique de Jeremiah entre le moment où il entreprend son voyage et celui où il devient un mythe y compris chez les indiens.
Au début il commet les mêmes erreurs que les personnages de Jack London (on ne fait pas de feu sous le couvert d'un arbre enneigé …).
A la fin, il reçoit la reconnaissance de "Chemise Rouge", un indien plutôt hostile dont il avait essuyé le mépris au début du film alors qu'il tentait, en vain, d'attraper du poisson à la main.
J'aime beaucoup la séquence où Jeremiah se retrouve affublé d'une femme, Swan, en plus du gamin muet qu'il avait déjà recueilli suite à un massacre de colons par des indiens. Au début de la séquence, il n'éprouve qu'indifférence envers Swan qui se transforme peu à peu en respect avant de devenir complicité puis amour.
Ce film peut être vu à plusieurs niveaux, celui de la simple aventure, celui du chemin initiatique pour atteindre le statut de "montagnard", mais aussi celui de la quête d'un bonheur quasi-métaphysique, celui de se trouver en communion avec la nature.
Ce film est apolitique, au-dessus de la politique, pourrait-on dire. Il n'est pas spécialement pro-indien mais n'est pas manichéen pour autant. C'est le retour à la nature, le retour à la vie sauvage où les lois apportées par la civilisation ne fonctionnent plus et où seules comptent la loi du plus fort ou celle du plus rusé ou encore celle du plus prudent.
Le film a été tourné dans l'Utah, dans les montagnes Rocheuses et les paysages aussi que la mise en scène de Pollack y sont somptueuses.
D'un point de vue casting, Robert Redford crève littéralement l'écran dans un rôle peu causant mais si expressif où manifestement il s'est fortement investi. C'est après "propriété interdite", le deuxième film qu'il tourne pour Pollack avant de devenir un de ses acteurs fétiches.
Parmi les autres personnages, Will Gear se distingue dans son rôle de vieil ermite, chasseur d'ours et contribuant à l'initiation de Jeremiah aux difficultés de la montagne.
Reste la musique du film de John Rubinstein (fils d'Arthur …) et la chanson en forme de ballade (traduite en français pour la VF) dont la voix du chanteur français est assez voisine de celui de la VO (Tim McIntire) qui apportent une grande sérénité à ce beau film un peu contemplatif.
Au final, j'ai toujours beaucoup aimé ce film que j'aime revoir régulièrement. Aussi, je n'hésiterai pas à qualifier ce western de chef d'œuvre.