On ne peut pas dire que jusqu'ici, Eric Lartigau avait particulièrement brillé, même si certaines de ses œuvres sont sympathiques, que ce soit « Prête-moi ta main », le très populaire « La Famille Bélier » ou le trop méconnu « Un ticket pour l'espace ». Avec « #Jesuislà », nous découvrons celui-ci dans un registre nouveau : la « comédie dramatico-mélancolico-existentielle ». Ainsi, l'introduction au Pays basque, sans être marquante, plante bien la situation et les enjeux à venir, malgré quelques choix assez étonnants. C'est toutefois clairement à l'arrivée de Stéphane (Alain Chabat, impeccable) en Corée que le film prend tout son sens, voire toute son ampleur, le récit devenant alors souvent imprévisible, Lartigau faisant preuve d'une inspiration dont il n'avait jamais fait preuve auparavant.


Au-delà de sa manière, étonnante, de filmer l'aéroport de Séoul puis la ville dans son ensemble, je trouve que l'œuvre en dit long sur notre capacité à nous interroger sur le destin, notre rapport aux autres et aux nouvelles technologies en général. Sorte d'anti-comédie romantique, le film n'est ainsi jamais vraiment là où on l'attend, décrivant avec beaucoup de justesse comment une décision « sentimentale » prise sur un coup de tête peut tourner à la plus grande des solitudes, à une « dérive » ouvrant toutefois des perspectives inattendues, à l'image de l'évolution de notre héros à travers ses pérégrinations.


Sorte de « Lost in Translation » français (sans Scarlett Johansson), évoquant également le « Terminal » et même brièvement « Elle et Lui », une douce mélancolie se dégage de l'ensemble, même si l'on pourra légèrement regretter que le réalisateur hésite dans le ton à donner à son œuvre, ou ce dernier quart où Stéphane est rejoint par ses fils, un peu longuet et moins pertinent dans le propos, heureusement illuminé par la personnalité de la délicieuse Camille Rutherford (comme quoi, pas besoin d'être présent des heures à l'écran pour briller). Bref, s'il y avait peut-être de quoi offrir une œuvre encore plus forte, troublante, on ne peut que se ravir que le cinéma français s'essaie à des histoires plus audacieuses, inattendues : ne serait-ce que pour ça, « #Jesuislà » vaut assurément le détour. Une bonne surprise.

Caine78
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le 12 févr. 2020

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