Comme vous le voyez à travers ce mauvais jeu de mots, traiter la question de la peine capitale par-dessus la jambe est fâcheux.
C'est pourtant ce qu'a fait Clint Eastwood avec Jugé coupable.


Cette question a été, au cinéma, réglée par Krzysztof Kieślowski avec son magistral Tu ne tueras point (1988).
Onze années plus tard, Eastwood revisite cette délicate thématique sur un mode fusion fort douteux : dilettante + drame.


Au cœur de son histoire, un journaliste cynique, cavaleur, buveur, chargé d'interviewer au débotté un condamné à mort sur le point d'être exécuté.


Ce Steve Everett (Clint lui-même) a du flair, et le revendique. C'est ce flair qui va l'amener à douter de la culpabilité du condamné.



That's my nose. To tell you the pitiful truth, that's all I have in life.



Avant lui, et pendant six ans, quantités de flics, d'experts et d'avocats ont dû se mobiliser ; un jugement a été rendu (parce qu'un jury a prononcé un verdict), mais c'est bien notre Steve qui, malgré une misanthropie en acier trempé, va peut-être faire éclater la Vérité-vraie, à quelques heures de l'injection mortelle.


( et ce n'est pas le fait de rappeler ces contre-expertises, ces jugements et rejugements en appel qui changera quoi que ce soit : Steve-le-loup-solitaire sauvera la tête d'un homme grâce à un présentoir de chips ! )


Pour mieux faire ressortir le caractère singulier du journaliste franc-tireur et de sa démarche volontariste, l'acteur-réalisateur met le paquet (de chips) : au siège du journal, comme chez lui, comme en prison, tout n'est qu'adversité, hystérie, bêtise...


Le discours progressiste du metteur en scène n'échappe donc pas aux clichés et au manichéisme.


En portraiturant le "mâle blanc" en connard (patron, chef de service, témoin principal, prêtre, gardiens de prison...) et en faisant au contraire de la femme (collègues de travail, maîtresse, épouse du condamné) et du Noir (condamné, RE-son épouse, RE-collègue de bureau, la grand-mère...) des figures sympathiques, Eastwood dessert son propos abolitionniste*.


La course contre la montre a beau être haletante


(on se demande quand même comment Steve peut entrer si facilement dans la propriété du gouverneur !)


, la douleur du condamné et de sa famille a beau être poignante, les seconds rôles ont beau être bons (le patron de la prison, tout particulièrement), l'ensemble --- à cause de la grossièreté du trait et de la légèreté du ton --- peine terriblement à convaincre.


*En 2008, Eastwood se prononce en faveur de la peine de mort pour les tueurs d'enfants.

Arnaud-Fioutieur
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le 10 févr. 2020

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