Les premières minutes me faisaient craindre de m'être embarqué dans un n'importe quoi au ton exagérément neurasthénique, dans lequel le cinéma indépendant américain en général a tendance à trop se complaire. Bon, Miranda July parvient à créer quelques images absurdement fascinantes dans un environnement physiquement réaliste et déprimant, à l'instar de cette mousse rose savonneuse qui semble ne devoir jamais arrêter de couler et d'envahir le "logement" dans lequel vivent les personnages. Il y a aussi une trop rare Debra Winger que je suis heureux de revoir. Mais s'il n'y avait eu que cela tout du long, je n'aurais pas aimé ce film.
Mais voilà, le personnage de Gina Rodriguez apparaît d'un coup et ça prend une toute autre tournure. À la place du vide que je craignais pour la suite, ce personnage va apporter de la substance à celui joué avec brio par Evan Rachel Wood, mettre en exergue la souffrance qu'a cette dernière à être maltraitée mentalement par ses indignes géniteurs qui la considèrent et la considéreront juste comme une jeune adolescente, alors qu'elle a 26 ans, devant servir, sans se poser de questions, leurs malhonnêtes et minables desseins de petits arnaqueurs ; tout l'inverse de kajillionaires (comprenez "milliardaires" !) qu'ils n'auront jamais l'ambition d'être, mais avec le point commun de vivre dans leur propre monde.
C'est à une libération psychologique que l'on va assister. Ce qui va renforcer l'attachement à cette fille qui ne pouvait pas être comme les autres jusqu'à une fin, réussissant l'exploit d'être à la fois cruelle, dans un certain sens rassurante, complexe, fraîche et optimiste.
C'est bon de voir que le cinéma américain indépendant, pour lequel je n'ai pas une affection débordante (pour la raison mentionnée plus haut !), est capable de sortir des films intelligents et profonds comme celui-ci.