Ça y est! Le grec Yorgos Lanthimos s’est loupé. Comme quoi, cela arrive et même aux meilleurs, comme s’il fallait à la plupart des auteurs contemporains reconnus une petite tâche dans leur filmographie ou une erreur de parcours. Alors certains prodiges y échappent comme Nolan ou encore Villeneuve (pour le moment). Ils ont certes peut-être fait des films moins bien accueillis ou plus clivants mais jamais de tâche véritable sur leur filmographie. Mais il arrive souvent qu’un auteur acclamé se lâche de manière un trop cavalière ou se révèle un peu trop sûr de lui et de la confiance qu’il inspire au spectateur après des œuvres portées aux nues et chaudement accueillies par la critique et le public. En gros, il se rate par excès de prétention ou pêché d’orgueil. Après le chef-d’œuvre « La Favorite » et l’excellent « Poor things » l’an passé, tous deux oscarisés de diverses façons, Lanthimos se plante donc royalement avec ce « Kinds of Kindness » profondément déplaisant et vain.


Il n’est pas le seul comme on le disait plus haut. Les cinéastes venant du cinéma indépendant passent souvent par-là, de David O. Russell et son improbable « I love Huckabees » à Darren Aronofsky et son détestable « Mother! » en passant par Paul Verhoeven et son détesté « Showgirls ». On lui pardonnera donc pour cette fois. Si, l’ensemble de ses films sont réussis bien que très particuliers, on reconnaît sa patte, ses obsessions et surtout ses scénarios farfelus et improbables. On avait certes été moins emballé par « Mise à mort du cerf sacré » contrairement à « The Lobster » ou « Canine » dans ses premières œuvres avant qu’il soit définitivement sacré et reconnu par Hollywood mais le film avait des qualités et proposait quelque chose d’osé et d’intrigant. Ici, dans son petit théâtre de la bêtise et du vice humain, ils poussent les curseurs de manière grossière et ridicule, comme trop sûr de son coup et de son art. Pour nous livrer finalement sur le sujet rebattu de l’emprise (conjugale, sectaire ou sociale) un triptyque désespérément vide, sans intérêt et surtout interminable où chaque histoire s’étire sur un scénario riquiqui et sans queue ni tête. Le genre de film tourné pas un inconnu qui n’aurait eu probablement aucun retentissement sur la planète cinéma.


Mais le pire, c’est que le cinéaste est reconnu pour ses qualités formelles et son inventivité et ici il nous livre une mise en scène sans génie, fade et tournée dans des décors qui le sont tout autant. On sent que c’est volontaire, mais rarement on a vu lieux de tournage aussi anonymes et laids. Ensuite, de vouloir faire un film à sketches en trois parties sur le même thème par la même troupe d’acteurs qui jouent différents rôles n’est pas une mauvaise idée en soi. Mais encore faut-il avoir quelque chose à dire et se rendre intéressant. Ici, outre ce sujet bien appuyé, on est un peu perdu, surtout dans le second segment. Il y a bien quelques scènes vaguement amusantes et tordues mais noyées dans un océan de bêtise et d’ennui. Le casting a beau être magnifique, il ne rattrape pas la chose et on se demande pourquoi l’excellent Jesse Plemons a eu le prix d’interprétation à Cannes tant sa prestation est correcte mais n’a rien de transcendant. Rien que dans les dix minutes où il apparait dans « Civil War » étaient plus marquantes ou son impeccable prestation dans la seconde saison de « Fargo ». « Kinds of Kindness » est donc une douche froide, une belle déception et surtout une œuvre interminable (près de trois longues heures!), prétentieuse, nombriliste et sans grand intérêt si ce n’est celui que la « haute » de la critique va lui trouver sous couvert de branlette intellectuelle... Et sans oublier une bande sonore assourdissante et horripilante! Passez votre chemin, vous gagnerez trois heures de votre vie et garderait un bon souvenir de cet iconoclaste cinéaste


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JorikVesperhaven
3

Créée

le 28 juin 2024

Critique lue 186 fois

2 j'aime

Rémy Fiers

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