Le provincial à la ville

Klute ... J'avais vu ce film au moment de mes études autour des années 77 et avais conservé un bon souvenir des prestations de Jane Fonda et de Donald Sutherland sans me souvenir de l'histoire. C'était un film culte à l'époque. Une référence. Je voulais donc le revoir et là, je suis déçu.

L'histoire, qui en vaut une autre, raconte la recherche par un détective, John Klute, d'un homme d'affaires pennsylvanien disparu un an auparavant. Possiblement dans cet enfer de perdition qu'est la ville de New York.

L'idée de départ est pas mal : vu de New York, la Pennsylvanie c'est la cambrousse. Et l'enquête d'un détective pennsylvanien qui se frotte aux milieux interlopes et glauques de New York doit ressembler un peu à un chemin de croix initiatique où il doit d'abord paraître crédible aux yeux du citadin, le vrai. On peut donc s'attendre à moult difficultés pour le détective et à une action pimentée que le new-yorkais de base ne devrait pas faciliter.
Sauf que non. Sauf que c'est mou. On comprend dès le début le fond de l'affaire de départ ce qui fait que c'est un thriller sans vrai suspense.
Donc en fait, il faut vite abandonner l'idée du thriller pour tomber dans un espèce de film noir tendance glauque dans lequel le détective va orienter son enquête autour d'une jeune call girl (de luxe) Bree Daniels.

Pour rester dans les généralités, la musique est pas mal dans le genre moderne (on est à New York, que diable), dans le genre "angoissant" aussi dont à la fin du film on attend toujours le suspense. Comme si le cinéaste avait oublié une partie du scénario... Allez, je déconne.

Il reste quand même les portraits des deux acteurs principaux.

Donald Sutherland, la trentaine en 1971, joue le rôle du détective. Son personnage fait tout-à-fait "premier de la classe", bien mis de sa personne, taciturne comme s'il avait quelque répugnance à fréquenter la lie de la société. Il questionne, il écoute et fait avancer tranquillement son enquête.

Jane Fonda est certainement celle qui porte le film. Elle joue le rôle d'une call-girl mais surtout d'une femme très complexe. On la voit tenter de se sortir de sa vie de prostituée pour devenir actrice en vain. Alors qu'elle considère qu'elle se met en scène avec succès et talent dans son job de call-girl (pour faire cracher au bassinet le client, un max).
On la voit consulter une psy dont on se demande bien ce qu'elle peut bien lui apporter car elle ne fait aucun commentaire. A la réflexion, c'est plutôt une astuce scénaristique pour raconter les états d'âme du personnage.
Bien entendu, et c'est le seul intérêt que je vois au film, on va la voir évoluer d'un rôle de joli petit animal de sexe tarifé, sans scrupule et manipulateur vers un rôle de femme capable de découvrir et développer quelques sentiments et, peut-être, un avenir moins incertain que celui qu'elle peut avoir dans son contexte de vie.
Jane Fonda a eu une pluie de récompenses pour son rôle dont un oscar. Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il n'est pas volé.

Côté réalisation, Pakula joue beaucoup avec les ombres, les scènes nocturnes (glauques) qui contrastent avec des scènes diurnes plus optimistes. Il "joue" en effet mais c'est parfois un peu longuet. Certains films de la Nouvelle Vague m'y font penser. A moins que ce soit le contraire, que ce soit plutôt la Nouvelle Vague qui a trouvé une source d'inspiration dans les films comme Klute.

En conclusion, je ne retiens du film que les prestations de Jane Fonda et Donald Sutherland.
Quant au reste du film, je trouve que le film culte des années 70 a bien mal vieilli.