C'est un Mocky sombre et désabusé, où l'auteur, après "Solo" et avant "un linceul n'a pas de poches", rejette la société française, son état policier, ses politiciens démagos et corrompus. Sa vision de toujours en somme. Moins révolutionnaire ou anarchiste que nihiliste, Mocky raconte la cavale d'un prisonnier évadé, condamné pour le meurtre d'une policier, dont le destin sera, on l'imagine au ton amer qui est celui du film et de son personnage principal, dramatique.
Evitant les barrages, Steff Tassel tente de gagner la frontière avec une otage qui, coincidence utile, est la fille d'un politicien en campagne électorale.
Le problème du film, c'est que le propos de Mocky n'est guère argumenté et s'exprime surtout à travers des personnages caricaturaux et des formules complaisantes et convenues. Lorsque le cinéaste, en d'autres occasions, joue la carte de l'humour satirique, il peut sans doute se les permettre. Dans "L'albatros", titre métaphorique pompeux qualifiant l'utopie libertaire du héros, la pauvreté et la maladresse du discours ne permettent pas qu'on lui porte un réel intérêt. D'autant que l'intrigue se signale, comme habituellement chez Mocky, par ses invraisemblances, ses raccourcis candides ou bâclés.
Tassel se pose en victime harcelée par la société, laquelle finira par gagner, sans qu'il ne se soit concilier la sympathie de sa jolie otage (Marion Game). Quelle idée de liberté Mocky défend-il? Que dit-il des moeurs politiques ou méthodes policières qu'on ne sache déjà? Je préfère, pour ma part, le Mocky insolent, le trublion, au Mocky sentencieux.