L'alpagueur est un mercenaire travaillant en sous-main pour un groupe de politiciens et de policiers désireux de s'affranchir des procédures pour combattre le crime illégalement.Il est amené à s'occuper de deux affaires en même temps,le démantèlement d'une importante organisation de trafiquants de drogue et la recherche d'un braqueur assassin surnommé L'épervier.Philippe Labro,connu en tant que journaliste,écrivain,animateur,dirigeant de média,il fut directeur de RTL,a aussi été un bon cinéaste.Il est réalisateur et scénariste de "L'alpagueur",dont il cosigne l'adaptation avec le romancier Jacques Lanzmann qui a écrit les dialogues.Le script se rapproche pas mal de celui de "Peur sur la ville",sorti l'année précédente.Même personnage,joué par le même Jean-Paul Belmondo, de policier-justicier aux méthodes brutales capable de cascades spectaculaires enquêtant à la fois sur une bande de truands et sur un tueur solitaire.Et tout comme on pouvait discerner dans le Verneuil des réminiscences de "L'inspecteur Harry",on peut déceler ici des traces de "Magnum Force" avec ces fonctionnaires appliquant la Loi officieusement et à leur manière.Ce film a plutôt mal vieilli et parait beaucoup moins efficace aujourd'hui que lorsqu'il est sorti.C'est dommage car il a au départ des qualités évidentes.La mise en scène sèche et réaliste de Labro instaure une ambiance crépusculaire et inquiétante renforcée par la musique à la fois élégante et stressante de Michel Colombier et les formidables décors déserts et désolés de Bernard Evein qui nous promène de l'immense port de Rotterdam au littoral languedocien en passant par la région parisienne au gré de routes paumées,d'entrepôts abandonnés et de banlieues dépressives.En outre le scénario entremêle habilement plusieurs histoires originales et les personnages sont tous équivoques,notamment les méchants,particulièrement retors,et principalement L'épervier qui,contrairement au meurtrier psychopathe de "Peur sur la ville",est un animal à sang froid exécutant ses victimes juste pour que personne ne puisse l'identifier,d'autant qu'il mène en parallèle une vie tout-à-fait ordinaire de citoyen lambda.Hélas de graves failles vont venir fissurer cette belle mécanique.Labro ralentit trop l'action et cette lenteur frôle parfois le contemplatif,quand par ailleurs il complexifie excessivement son scénario au point de le rendre in fine peu compréhensible,les rapports entre le gang de trafiquants et le cartel de justiciers devenant des plus obscurs.On peut ajouter à ça un certain nombre de scènes fort mal agencées en ce qui concerne leur rythme et leur déroulement,des personnages au comportement peu rationnel et des acteurs manquant souvent de justesse,ça commence à tanguer sévère.Il faut également pointer la nullité des séquences de baston,totalement foireuses bien que réglées par le célèbre Claude Carliez.Rémy Julienne est crédité au générique comme directeur des cascades automobiles mais il y en a fort peu.Mais le pire est atteint avec les dialogues de Lanzmann,complètement nazes.L'homme était un très bon écrivain et un grand parolier,on se souvient de ses chansons pour Dutronc,mais les dialogues de cinéma,ce n'est visiblement pas son truc.Il fait dans le littéraire dégénéré et n'aboutit qu'à un texte ampoulé émaillé de saillies pseudo ironiques et malignes pleines de sous-entendus mais ça ne marche pas du tout.En l'état,on dirait qu'il court derrière Audiard sans avoir le centième de son talent.Et puis il y a le problème Bébel.L'acteur était une superstar à l'époque et en plus ici c'est le patron puisqu'il coproduit le film avec son associé René Château via leur société Cerito Films.C'est même Alain Belmondo,le frère de Jean-Paul,qui est directeur de production.Il en profite donc pour nous infliger un de ces numéros de frime insensée agrémentée de poses avantageuses,comme il le faisait régulièrement,tandis que certaines scènes,comme celle de la poursuite du camion,semblent avoir été tournées uniquement pour mettre en valeur ses qualités athlétiques.Ses partenaires s'en tirent diversement mais tous sont pénalisés par les répliques navrantes qu'ils doivent débiter.Patrick Fierry remporte haut la main la palme de l'acteur à côté de la plaque dont on se demande comment il a pu être casté tant son surjeu est atterrant de nullité.Claude Brosset,Jean Negroni et Victor Garrivier,de solides professionnels,s'en sortent à peu près grâce à leur métier.Reste le cas Bruno Cremer.On ne l'a jamais vu mauvais et là,une fois encore,il est magistral en assassin glaçant aussi dangereux qu'il peut se montrer rassurant,et le film vaut d'être vu rien que pour sa performance hélas intermittente car son personnage apparait finalement peu.