Deux critiques, la première écrite peu de temps après la sortie du film et la seconde en 2022 pour un ressenti sensiblement identique.
Première critique (2014) (7/10) :
Malgré mon peu d'attrait pour « Les Derniers jours du monde », j'ai décidé de donner une seconde chance aux frères Larrieu, d'autant que la bande-annonce comme le sujet étaient plutôt séduisants. Je ne le regrette pas, les frangins réussissant ici ce sur quoi ils avaient échoué précédemment : créer une véritable atmosphère, intriguer, fasciner. C'est très écrit, mais cela est toujours au service de cet univers étrange, énigmatique, où l'on parvient à s'intéresser à des personnages pourtant perturbés et perturbants, loin des discours moraux et conventionnels qu'on a alors l'habitude de nous tenir en pareilles occasions.
Ainsi, j'ai suivi l'évolution de chacun avec intérêt, les réalisateurs réussissant souvent à nous surprendre par des situations étonnantes et originales, voire parfois vraiment dérangeantes. Dommage (quand même) que l'intrigue policière s'avère un prétexte complètement bidon pour explorer la nature humaine dans toute sa complexité, amenant chez moi une certaine frustration, voire un léger agacement à la fin du film. Reste qu'il y a de quoi être séduit par cette expérience de cinéma quasiment inclassable, mais respectueuse de son public et même capable de beaux moments de sensualité : moi, je prends.
Seconde critique (2022) (7/10) :
Pas revu depuis sa sortie au cinéma, j'ai été heureux de constater que mon avis positif de l'époque n'avait que très peu évolué. Ambiance enneigée étrange et plutôt réussie, climat sulfureux, légèrement pervers excellemment rendu, personnages ambigus, intrigants, malaise prégnant : « L'Amour est un crime parfait » est probablement la plus belle réussite des frères Larrieu, construisant un vrai-faux suspense avec beaucoup d'habileté, rendant assez imprévisible le récit, presque insaisissable tant les différents protagonistes se révèlent donc complexes, les relations entre les uns et les autres ne cessant d'évoluer pour un résultat toujours plus troublant, dans lequel on aime autant se plonger que se perdre.
Les réalisateurs abusent de l'ellipse, du hors-champ : autant je ne suis pas du tout adepter du « tout montrer », mais égarer volontairement autant de pièces du puzzle n'était pas forcément la meilleure solution. Mais cela permet sans doute aussi de rendre notre héros intrigant, presque attachant, toujours intéressant. Il y a une dimension presque « intellectuelle » à travers la littérature, séduisante sans être élitiste, le cœur du propos restant le désir, le sexe, souvent associés à la mort. Mathieu Amalric y trouve un de ses plus grands rôles, idéalement entouré par une Karin Viard affolante de sensualité, l'énigmatique Maïwenn et Sara Forestier, pas en reste pour faire monter la température. Un thriller intense et à l'image de son dénouement : explosif.