L’Amour Ouf, de Gilles Lellouche, est sans conteste le film de cette fin d'année 2024 à ne pas manquer. Adapté du roman éponyme de Neville Thompson, il raconte la passion entre deux adolescents du Nord de la France : Jackie, qui vient de perdre sa mère, et Clotaire, un délinquant issu d'une famille ouvrière. Dix ans plus tard, l’intrigue explore les possibles retrouvailles des deux amants, alors qu’aucun des deux ne s’est jamais oublié.
Le film brille par de nombreux aspects, frôlant la perfection. La photographie, l’esthétique et la poésie du montage ainsi que la réalisation sont particulièrement marquantes. Le scénario, malgré ses 160 minutes, ne lasse jamais : chaque séquence est bien dosée et véhicule un message, un sentiment, un enseignement. On sent un travail d’orfèvre.
La bande sonore est un autre atout, ravissant tous les amateurs des années 80-90. Ce film enveloppe le spectateur dans une atmosphère réconfortante, en contraste avec des scènes d'une puissance émotionnelle saisissante. Certaines scènes m'ont profondément bouleversé, mais je préfère ne pas en révéler davantage pour laisser intacte l'expérience de ceux qui n'ont pas encore vu le film. La durée ne devrait en aucun cas refroidir les spectateurs : les minutes s'écoulent sans qu’on s’en rende compte.
Les acteurs, d’un talent impressionnant, sont un élément clé de cette réussite. Adèle Exarchopoulos est tout simplement divine : son jeu est authentique, intense, et captivant. François Civil est également remarquable ; il dégage une profonde émotion. Le couple à l’écran est aussi séduisant qu’attachant, tout comme leurs versions adolescentes, incarnées par de jeunes acteurs prometteurs qui étonnent par leur justesse. La scène d’ébat est d’une tendresse et d’une pudeur rares.
Alain Chabat est impeccable, comme souvent, et même Benoît Poelvoorde, que j’apprécie moins d'ordinaire, a su me convaincre malgré quelques moments où il retombe dans ses habitudes "poelvoordiennes" un peu embarrassantes. Les apparitions de Jean-Pascal Zadi apportent une fraîcheur bienvenue, et Elodie Bouchez, dans le rôle de la mère de Clotaire, livre l’une des scènes les plus émouvantes du film, pleine de tendresse.
La conclusion surprenante est une raison supplémentaire d’apprécier cette œuvre.
Si je n’attribue pas la note maximale, c’est en raison d’un petit bémol : lors de la scène finale où Jackie s’adresse à son patron, une légère dissonance dans la crédibilité du dialogue se fait sentir. La réaction de l'interlocuteur semble un peu trop "commode", et j’aurais imaginé une opposition plus marquée, qui aurait ajouté un zeste de réalisme à l’échange.
En toute honnêteté, je chipote, car le film est bouleversant et parfaitement maîtrisé. J’ai passé un moment inoubliable ; cela faisait longtemps qu’un film français ne m’avait pas autant enthousiasmé. Bravo à Lellouche pour cette réussite.