Page retrouvée du journal de bord de M. I. Pliskin datant du 15/02/18 avant internement à Arkham – Suffolk, Angleterre


Je me suis souvent livré à ce que l’on appelle dans le jargon scientifique « une petite expérience de pensée », seul avec mon imagination et mes fantasmes. Si le postulat de base est on ne peut plus simple, la solution reste peu évidente pour quelqu’un d’aussi peu cultivé que je le suis :
J’aime le cinéma et j’aime Lovecraft. Comment associer ces deux passions efficacement ? Qu’est-ce que serait un bon film tiré (ou très fortement inspiré) de l’univers d’un des pères de l’horreur cosmique ?


Evitons de nous compliquer la tâche et posons-nous dans une situation idéale sans paramètres extérieurs ni contraintes : Si j’étais un cinéaste et cinéphile dans des conditions optimales, un gros budget, du renom, aucun cahier des charges imposé par la production, paré à créer une œuvre et non un pur produit de consommation calibré et sur-codifié etc… Comment s’y prendre ?


Alors oui je ne suis pas un grand fan de littérature mais il y a bien un auteur qui aura su capter mon attention. C’est donc sans la moindre once d’originalité que, mesdames et messieurs, j’ose l’avouer : J’adore les écrits du maitre de Providence.


Cet homme qui n’écrivit jamais « ma voiture est rouge » mais plutôt « ma voiture n’est ni verte, ni bleu ».


L’homme qui voulait déjà briser les codes du fantastique, codes qui se reposaient alors sur les acquis d’un bestiaire surexploité. Momies, vampires, zombies et autres spectres ne suffisaient plus pour cet esprit fécond qui donna alors naissance à tout un panthéon noir qui aujourd’hui encore fascine autant qu’il dérange. Mais toutes ces abominations partagent un point commun, et non des moindres, elles sont indescriptibles.


Grotesques, étranges, non euclidiennes et irrégulières au possible, monsieur Providence nous offrait à chaque fois une description non pas des créatures elles-mêmes, mais plutôt de l’effroi et des sentiments que provoque la simple vue de ces choses venues d’ailleurs.


Et si le medium littéraire sert ici parfaitement le propos, il était impensable pour moi de m’imaginer un tel cauchemar sur grand écran. A moins peut-être de jouer de tous les outils cinématographiques à notre disposition pour suggérer, laisser entrevoir un bref aperçu de ce que pourraient être ces horreurs.


Il faudrait alors un récit fort et une structure narrative puissante pour appuyer et justifier ces effets de style nécessaires. Un avantage tactique que nous offre Howard est la redondance de certains thèmes qui lui sont chers et donnent à ces écrits un aspect pessimiste à la frontière entre fiction et réalité.
Une ligne idéologique dont on peut tirer parti pour construire une histoire forte :


La lecture d’écrits horrifiques, un savoir interdit, occulte, ésotérique. La dégradation de la santé mentale seule résultante de l’impuissance inhérente aux personnages accablés de doute. La décadence de la civilisation, petit grain de sable impuissant devant des forces innommables qui la dépasse et qu’elle ne peut comprendre.


Seuls le génie ou la folie pourrait pousser un homme à entreprendre un tel chantier qui, au final, ne saurait être parfait et risquerait de s’attirer les foudres du spectateur lambda…


Et puis j’ai vu « In the Mouth of Madness ».

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le 15 févr. 2018

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Iroquois P.

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