Porté par des critiques positives et le plaisir de voir le cinéma français s'attaquer au fantastique, genre qu'il aborde peu fréquemment (euphémisme), j'avoue que j'attendais un minimum de cette « Aventure des Marguerite » promettant a priori un joli spectacle. Malheureusement, à croire qu'il faut parfois désespérer tant j'étais régulièrement désolé de ce que je pouvais voir. Presque tout de suite, j'ai compris que cela n'allait pas fonctionner. S'enfermant d'emblée dans une logique familiale appuyée, à base de conflits avec le beau-père et d'émancipation des femmes (comme c'est original!) accentuée par des discours balourds sonnant régulièrement faux, les jolis espoirs se sont estompés, n'exploitant presque jamais le formidable potentiel du voyage temporel, se contentant de quelques grosses allusions pour souligner les différences entre les deux époques (la Seconde Guerre mondiale et le présent).
Pourtant, cette idée d'envoyer la première héroïne dans le passé et vice-versa était l'occasion d'une belle réflexion sur la difficulté de se retrouver confronté à une période qui n'est pas la nôtre, encore aurait-il fallu creuser les situations et les enjeux, aussi plats que linéaires, ou s'intéresser à un autre temps que celui de la guerre de 39-45, sentant vraiment la solution de facilité, comme en témoigne l'invraisemblable (et sans grand intérêt) parcours de Margot, souvent plus proche de la grosse comédie que du cinéma d'aventures.
L'évasion du camp est à ce titre un grand moment de n'importe quoi involontaire,
illustrant assez bien le manque d'implication dans le scénario ou les personnages, exception faite du jeune Nathan, joliment interprété par Nils Othenin-Girard, légèrement caricatural mais le seul à apparaître vraiment à sa place et dans le ton qu'aurait dû être cette « Aventure des Marguerite ».
À ce titre, une scène est pour moi symptomatique du film : celle où
Margot fait découvrir à son ancêtre une chanson du futur, et au milieu des centaines de merveilleux morceaux qu'elle aurait pu lui proposer, elle choisit... un morceau de rap immonde ayant d'ailleurs l'air de plaire sans grande logique à son aïeul :
de là à y voir une métaphore de ce qu'aurait dû être ce projet placé entre de bonnes mains... Quelques points positifs : l'histoire contemporaine est un peu plus intéressante (même si la réaction des uns et des autres est tout aussi peu crédible), la jeune Lila Gueneau se révélant plus touchante dans ce rôle (oui, je n'ai pas précisé : elle interprète les deux héroïnes) et une poignée de scènes touchantes lorsque les deux époques se répondent, malheureusement souvent gâchées par une volonté d'aller toujours vite, de ne jamais prendre le temps de se poser pour s'écouter, se parler : l'un des grands maux du cinéma actuel, en passant...
Mais les manquements dans l'écriture sont tellement criants à ce niveau
(l'ancêtre de Clovis Cornillac, l'apparition complètement à contre-courant d'Ernest Hemingway, pour ajouter à une liste déjà longue)
qu'à chaque fois que le récit semble vouloir prendre un peu de hauteur, ce dernier retombe lourdement au sol, plombé par ces velléités familiales et un « humour » pour le moins dispensable, anéantissement systématiquement ses chances d'être la jolie réussite qu'il aurait pu, dû être. Un beau gâchis, en somme.