Souvent, je cherche l'équilibre dans le cinéma entre le contenant et le contenu. La plupart du temps, on a une mise en scène qui ne rend pas hommage au récit qu'il veut mettre en avant. On se retrouve donc face à un film qui relève plus de l'ordre du documentaire que du vrai long métrage de cinéma. Que se passe-t-il quand la mise en scène accompagne avec brio un message engagé ?
L'histoire de Souleymane emporte le spectateur dans 1h15 d'angoisse et 15 minutes de pleurs. C'est fort puisque le sujet est assez connu (du moins dans ma sphère bobo-gaucho-parisiano-"engagée") : un livreur Uber Eats qui vit un enfer, on en a vu passer des récits.
Mais ici, la force, c'est surtout la caméra qui nous embarque de force dans cette épopée pour nous mais ce quotidien pour Souleymane. Presque tout le long du film, on court derrière lui, on le succède au pas de la porte de chaque restaurant, chaque appartement et toutes les interactions sont un nouveau risque de voir toute une vie s'écrouler. On n'a pas un film informatif et didactique mais un pur oeuvre de cinéma.
Cette critique n'inventera rien quand elle comparera l'histoire de Souleymane à un film des frères Safdie. Je me rappelle d'un visionnage de Uncut Gems où l'on n'osait pas se lever de nos chaises tellement la tension était présente dans chaque scène. On la retrouve ici et on sort épuisé de cette séance où l'on est passé par tous les états.
Les 15 dernière minutes reviennent sur la véritable histoire de Souleymane, ou plutôt d'Abou Sangaré. Effectivement, c'est bien lui qui joue son propre rôle à l'écran. Quelle maitrise ! Les mauvaises langues diront que c'est plus facile de jouer son vrai vécu, on emmerde les mauvaises langues. La lumière se rallume dans une salle 1 totalement médusée, émue et épuisée par ce qu'elle vient de voir. Silence complet.
Un film maitrisé de bout en bout avec un acteur principal au sommet. De l'angoisse, de la tension, des pleurs, pédalez donc jusqu'à votre salle de cinéma voir l'histoire de Souleymane !