On ne va pas se mentir, ce n’est pas un film réjouissant… Mais c’est un mal nécessaire.
Alors oui, on sait la détresse des migrants, on sait l’esclavage moderne par UBER, on sait…
Mais au-delà de ce que le film peut nous apprendre sur les conditions de vie des demandeurs d’asile, je pense qu’il faut le voir car on leur doit légitimement 1h30 de pleine conscience, en espérant qu’on en sorte un peu changé, un peu meilleurs. Sans pour autant tout abandonner et se consacrer à leur cause, on peut au moins arrêter les conneries de livraison de repas (… même si, sur ce point, je ne me sens pas concerné).
Mais tout ça ne fait pas une critique de film.
On a des exemples à la pelle de films médiocres qui se retrouvent plébiscités en raison de la force de leur sujet et en profitant du contexte politiquo-médiatique du moment.
Mais ça n’est pas le cas de l’Histoire de Souleymane. Je ne vais pas en faire des caisses, le film est bon. Même si je ne suis pas fan de ce type de mise en scène quasi-documentaire (autant faire un documentaire...), c’est bien filmé, et le montage installe une vive tension. On pense au « A plein de temps » avec Laure Calamy, mais en plus dramatique évidemment.
Et l’interprétation est impeccable. Les esprits chagrins pourront s’interroger sur la notion « d’interprétation » quand l’acteur porte à l’écran sa propre vie… Mais franchement, on s’en fout car, emporté par le film, on n’y pense vraiment plus.
J’aurais juste une réserve sur un choix artistique du réalisateur. Cela semble être une marque de fabrique de Boris Lojkine au vu de son précédent « Camille », mais je ne suis pas fan du format 4:3. Certains réalisateurs justifient ce choix pour renforcer, par exemple, le sentiment d’enfermement dans un huis-clos (cf. The Whale d’Aronofsky). Mais, je n’arrive pas à m’y faire. Ça fait « télé »... et encore, je ne parle pas des écrans 16/9 d’aujourd’hui, mais plutôt des tubes cathodiques de mon enfance. Sauf que, quand je vais au cinoche (et que je paie ma place...), c’est justement pour voir du cinéma, et pas de la télé.
Mais pour ne pas terminer sur cette critique, je conclus en mentionnant le silence assourdissant dans la salle lorsque la lumière s’est allumée. Je n’avais pas ressenti cette impression depuis La Haine en 1995. On se doute qu’il s’agit là d’un effet recherché par le réalisateur mais qui traduit bien l’impact de son film.