Michael Cimino disait que l'on "fait des films pour la même raison que l'on entreprend des voyages", ainsi il redonnait sens au ciné-œil représenté par Dziga Vertov dans ce film.
Le cinéma est un média communiquant avec le réalisateur, l'objet ou le sujet du film, et le spectateur : la caméra ne montre pas seulement, elle véhicule des émotions et représente chacun. Filmer est une chose, mais pourquoi justement, la mise en scène existe-t-elle ?
Le cinéma est un voyage, il illustre le monde tel un documentaire.
L'oeuvre de Vertov témoigne d'une indéniable force formelle, jouant entre les diverses expérimentations techniques (on pensera à la technique du ralenti, de la caméra portée notamment) afin de représenter la Vie. Ainsi il s'agit d'une part, de susciter l'émotion du Spectateur au moyen de la représentation des activités les plus communes. Il est question de voyages à travers la ville notamment, et d'activités artisanales : le cinéaste met en lumière, le parallèle de l'Art et du travail, et si chaque artisan était artiste, et si leur travail n'était pas si différent ?
Le cinéaste filme l'humanité, il filme chaque individu sans définir leur identité, l'artiste a les pleins pouvoirs sur son œuvre et choisit de décrire le vrai selon sa perception du Monde.
Il ne s'agit pas seulement de représenter la réalité, mais de la transcender au moyen du Septième Art.
Le cinéma est une aventure exaltante, remplie d'émotions.
L'Homme à la caméra ne dénie cependant pas le pouvoir du cinéma, soit celui de rapprocher l'Audience à chacun des personnages. A l'image des deux bus qui se croisent, la femme accouchant et l'autre se mariant dans la ville ne font qu'une, l'allégresse est commune. Les spectateurs s'identifient, se reconnaissent et finissent par pleurer de joie ; parce qu'en effet, eux aussi ont déjà vécu cela et pourraient remplacer les acteurs du film.
Le cinéaste lui-même affronte les différentes péripéties du tournage, il prend des risques et concilie effets spéciaux avec captation de l'image. Cet exercice l'amène ainsi à mettre en scène l'impossible, à la manière du caméraman filmant le train filant à toute vitesse.
En filmant le minime, le réalisateur transforme l'image par les effets de mise en scène et le montage : il alterne entre les genres, peut donner vie au surréalisme et susciter l'angoisse, la peur.
Enfin, l'Art est l'exercice du passionné, l'imagination et la sincérité du réalisateur doivent demeurer inaltérées pour la finalité de l'œuvre. Le cinéma ne fait pas exception, en s'intéressant au passé, au futur de notre société, le Septième Art permet l'impossible : déconstruire les barrières du temps, redonner vie au passé et représenter la grande Humanité.
Quand le cinéaste détache son regard du monde qui l'entoure, l'objectif de la caméra se ferme. Le film nait, la perception de l'auteur demeure intacte.
(From Dziga Vertov, "I'm an eye. A mechanical eye. I, the machine, show you a world the way only I can see it...")