The night is dark, the way is far for a man without a star

King Vidor est un des grands réalisateurs hollywoodiens épiques avec des westerns comme le "Grand Passage" ou des fresques genre "Salomon et la Reine de Saba" sans oublier le formidable "Guerre et Paix".
Mais il a réalisé d'autres films comme "L'homme qui n'a pas d'étoile" qui est un western dont le scénario ne manque pas de profondeur sur des grands sujets assez habituels dans les westerns de cette époque sur la propriété individuelle, sur la nécessaire mise en place de la civilisation dans l'ouest.


Un aventurier, Dempsey, (je n'ose pas dire cow-boy puisqu'il n' a qu'une selle, pas de cheval et pas de revolver) arrive dans une petite ville accompagné d'un jeune naïf, Jeff, qui s'est enfui de chez ses parents et qu'il a pris sous son aile. Ils se font embaucher chez le gros éleveur local qui veut profiter de "l'open range" pour s'installer partout y compris chez les petits éleveurs ou fermiers qui ne voient pas ceci d'un bon œil et envisagent de se protéger en installant des barbelés.


Le thème le plus important du western est le droit de la propriété individuelle ; on n'est plus dans la situation où les pâturages étaient illimités, à perte de vue ; désormais, de nombreux nouveaux colons sont arrivés et le fourrage et l'eau ne sont plus forcément assurés pour tout le monde nécessitant que chacun puisse s'organiser chez lui. De ce fait, les barbelés délimitant la propriété deviennent indispensables.


La mise en scène ainsi que la photographie et les cadrages sont excellents et relèvent de la grande expérience de King Vidor.
Le western fait alterner des scènes comiques avec un humour parfois un peu épais avec des scènes de grande tension dramatique.


C'est côté casting qu'il y a pas mal de choses à dire.


Le rôle de l'aventurier Dempsey est joué par Kirk Douglas. Son jeu est comme toujours excellent mais fait parfois son one-man-show (scènes de saloon où il danse, virevolte et chante) qui ne me dérange pas, moi personnellement car typique de l'acteur, mais dont je reconnais que ça peut agacer. Mais invariablement, une scène "burlesque" est immédiatement suivie d'une scène beaucoup plus grave montrant que la scène amusante n'était qu'une apparence. Témoin la scène du duel où le jeune Jeff tue un cow-boy agressif qui fait suite à une scène de pitrerie et où Kirk Douglas se retourne sur lui, profondément meurtri de voir que son "élève" a dépassé le maître et n'est devenu qu'un tueur. Le rictus de haine qu'arbore alors le visage de Kirk Douglas pendant quelques instants est la leçon ultime en miroir pour le jeune.


Le jeune Jeff, c'est William Campbell qui évolue durant tout le film. Au début, il n'est qu'un clodo en guenilles, mais dès qu'il touche quelques dollars, il court s'habiller et revient dans une superbe "panoplie" de cow-boy d'opérette tout-à-fait désopilante.


Un autre personnage intéressant est la nouvelle patronne, Reed Bowman, du gros ranch dont les visées sont expansionnistes. L'actrice qui tient le rôle est Jeanne Crain. Le rôle est celui de quelqu'un qui n'est pas étouffé par les scrupules, qui ne doit pas hésiter à mordre, qui pour s'imposer auprès des coriaces cow-boys doit user du knout, etc . Le tout sans élever la voix. Et là, Jeanne Crain est une personne qui n'en impose pas assez pour mon goût. Il faut surtout voir le personnage en VO car la voix de la femme qui double en français (la mère de Catherine Deneuve) me semble un peu trop douce. Elle tente de séduire Kirk Douglas qui fait preuve d'une insolence ironique sans bornes et qui au final refusera de marcher dans la combine. La scène de la séduction est remarquablement bien jouée, suggestivement très efficace. Le seul problème que j'y vois c'est qu'elle ne me semble pas convenir à une "patronne" à poigne de fer qui est quand même l'idée de base du rôle.


Un personnage que j'ai bien apprécié est celui du contremaître Strap Davis qui embauche Kirk Douglas et le jeune Campbell. C'est un personnage "droit" joué par le charismatique Jay Flippen ; malheureusement il s'efface assez rapidement viré car n'étant pas d'accord avec les ordres de sa patronne. Il sera d'ailleurs remplacé par Richard Boone, authentique méchant dans les westerns.


Au final, on ne va pas bouder notre plaisir, c'est un très bon western avec des thèmes intéressants.


La chanson "country" du générique chantée par Frankie Laine est agréable et assez obsédante.
Elle montre que l'homme qui n'a pas d'étoile n'est pas un shérif qui aurait perdu son étoile mais plutôt un homme qui n'a pas trouvé son étoile dans le ciel pour le guider...


Who knows, who knows
Was I right, was I wrong, the way I chose
The night is dark, the way is far
For a man without a star

JeanG55
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Westerns et Les meilleurs films de 1955

Créée

le 6 juil. 2021

Critique lue 212 fois

14 j'aime

12 commentaires

JeanG55

Écrit par

Critique lue 212 fois

14
12

D'autres avis sur L'Homme qui n'a pas d'étoile

L'Homme qui n'a pas d'étoile
Ugly
7

Des barbelés dans la prairie

Bien que King Vidor ait avoué avoir réalisé ce film pour payer ses impôts, il n'en signera pas moins un chef-d'oeuvre, on peut même affirmer qu'il porte sa marque indiscutable, que ce soit dans la...

Par

le 21 déc. 2016

22 j'aime

2

L'Homme qui n'a pas d'étoile
cinemusic
9

L'homme qui fuit le fil...

Dempsey Rae (Kirk Douglas), un aventurier errant, se lie d'amitié avec le jeune Jeff Jimson (William Campbell) à qui il va apprendre notamment à se servir du révolver. Devenu contremaitre d'un ranch...

le 28 avr. 2022

15 j'aime

4

L'Homme qui n'a pas d'étoile
JeanG55
8

The night is dark, the way is far for a man without a star

King Vidor est un des grands réalisateurs hollywoodiens épiques avec des westerns comme le "Grand Passage" ou des fresques genre "Salomon et la Reine de Saba" sans oublier le formidable "Guerre et...

le 6 juil. 2021

14 j'aime

12

Du même critique

L'Aventure de Mme Muir
JeanG55
10

The Ghost and Mrs Muir

Au départ de cette aventure, il y a un roman écrit par la romancière R.A. Dick en 1945 "le Fantôme et Mrs Muir". Peu après, Mankiewicz s'empare du sujet pour en faire un film. Le film reste très...

le 23 avr. 2022

25 j'aime

9

125, rue Montmartre
JeanG55
8

Quel cirque !

1959 c'est l'année de "125 rue Montmartre" de Grangier mais aussi des "400 coups" du sieur Truffaut qui dégoisait tant et plus sur le cinéma à la Grangier dans les "Cahiers". En attendant, quelques...

le 13 nov. 2021

24 j'aime

5

La Mort aux trousses
JeanG55
9

La mort aux trousses

"La Mort aux trousses", c'est le film mythique, aux nombreuses scènes cultissimes. C'est le film qu'on voit à 14 ou 15 ans au cinéma ou à la télé et dont on sort très impressionné : vingt ou quarante...

le 3 nov. 2021

23 j'aime

19