Voir Guillaume Brac réaliser un documentaire à tout de l’évidence tant son cinéma transpire l’envie de capturer le réel sans artifice ni effet de style inutiles. Que ce soit son moyen-métrage « Un monde sans femmes », son premier long « Tonnerre » ou son dernier film sorti après celui qui nous occupe le formidable « A l’abordage », chacune de ses réalisations tend vers le naturalisme. Il en est de même pour « Contes de juillet » dont un des segments partage le lieu de « L’île au trésor », l’île de loisirs de Cergy-Pontoise.
Ce qui frappe au visionnage de « L’île au trésor » est à quel point la notion de territoire est travaillé et travaille Guillaume Brac. Ainsi, ce qu’il capte est avant toute autre chose l’appropriation d’un espace par ses usagers, de cet espace hors-du-monde qu’est cette île de loisirs de Cergy-Pontoise, véritable monde à part, où enfants, jeunes, vieux, familles se retrouvent, se mélangent, jouent, rient, draguent et vivent le temps d’une journée estivale un moment de vacance du monde extérieur. On passe donc d’une personnes à une autre, d’un groupe à l’autre, d’un espace ombragé à la plage en passant par des lieux plus mystérieux (une pyramide sur l’eau), au gré des récits et des souvenirs qu’offre les lieux à celles et ceux qui le pratiquent.
Comme tout territoire ce dernier à des limites, marquées par des grilles et des tourniquets, surveillées nuits et jours par des vigiles. L’entrée par la resquille constitue, de fait, un des points névralgiques du récit et la négociation avec un règlement ; zones de baignade interdite et autres sauts du pont ; qui volent en éclat dès que le personnel du lieu à le dos tourné. Le film offre ainsi en contrepoint les réunions de coordination entre un directeur représentant les pouvoirs publics (tenant de l’aménagement du territoire et donc par définition de l’ordre) et un chef de la sécurité davantage au contact des populations.
Enfin, l’appropriation du lieu se joue également à travers les souvenirs racontés en voix-off ou face caméra par des usagers. Souvenirs directs du lieu, d’une sortie pédagogique 40 ans auparavant, du vol de glaces et de sodas ou de souvenirs que la présence dans le lieu évoque comme celui raconté par un gardien de nuit, surveillant la frontière de l’île de loisirs tout en évoquant sa fuite de son pays d’origine. Se tisse alors une véritable poétique du territoire.
Définitivement, Guillaume Brac est un (très) grand cinéaste.