Il est de notoriété publique que le Japon est un pays de chats (l'Asie de manière générale dispose dans certains pays de bars à chats). Nous avons certainement tous un ami revenu du pays du soleil levant avec son chat doré sous le bras, lequel balançant sa patte droite d'avant en arrière nous jette des regards espiègles.
Même si la race canine n'est pas exclue dans le monde réel, elle l'est dans la ville de Megasaki, théâtre des marionnettes de Wes Anderson. Après l'introduction en peinture traditionnelle, le spectateur est introduit à l'île de déchets qui sert de territoire abandonné aux chiens. Tout est là. Les décors sont ambitieux, changent de zone en zone en gardant une certaine continuité entre eux, propices à la mise en scène et au style du réalisateur. En effet, en bon maître de la symétrie, quel architecture est plus adaptée que celle du Japon, ses bâtiments séculaires et son histoire. Aussi son histoire artistique avec quelques séances de théâtre Kabuki, le maire de la ville au visage si familier au personnes qui ont déjà vu le visage de Toshiro Mifune, la musique... Je m'arrête là.
Après le "coup d'essai" qu'était Fantastic Mr. Fox et l'excellent Grand Budapest Hotel, Anderson nous présente un voyage de 5 canins (ces chiens sans maîtres ne sont-ils pas des Ronins?) accompagnés du petit pilote, à la recherche d'un chien garde du corps (Yojimbo en japonais). Divisé en plusieurs zones distinctes qui verra les personnages se déplacer dans un mouvement latéral si cher au réalisateur et l'impression toujours plus forte du spectateur d'être confronté à un tableau mouvant comme un spectacle de marionnette pour enfant (un spectacle parfaitement interprété par les animateurs et par les voix que le spectateur s'amusera, ou non, à retrouver). Plans zénithaux, gros plans, symétrie (comme dit précédemment), faces à faces (notamment amoureux), autant de marques de fabriques de l'ovni du cinéma moderne qui font la joie des amateurs de son monde, qui s'étend d'oeuvre en oeuvre en conservant sa constante singularité.
Enfin, on pourra dresser un léger parallèle entre la ville de Mégasaki d'Isle of Dogs et l'Amérique du monde réel, sur lequel on ne développera pas tant la forme du film n'est pas propice à une extrapolation au réel. Cependant les éléments sont là, entre fake news, assassinats politiques et répression, le parallèle est visible à l’œil qui souhaite le voir et invisible à celui qui se laisse prendre par la main dans un simple film d'aventure. Mais n'est-ce pas là être intelligent ? Intégrer un message dans son film assez caché pour être invisible au spectateur qui s'expose au cinéma comme divertissement et assez visible pour être trouvé par le spectateur qui explore plus en profondeur ?