Attention, cette critique contient des spoilers.
Ayant eu le malheur de sortir 3 mois après Le Prestige, L'Illusionniste constitue une version optimiste de l'oeuvre de Nolan, construisant une histoire de triangle amoureux relativement identique en beaucoup moins sombre, le twist final allant à l'inverse de son distingué prédécesseur. Et si le duo Bale/Jackman éclipsera complètement l'affrontement Norton/Sewell, il en ira de même pour tout le reste du film, bien plus proche du bon téléfilm du dimanche que du film d'auteur portant sur la magie.
Manquant cruellement d'ambition, il se contente de mener le spectateur en bateau sans grande classe, multipliant les faux angles d'attaque pour mieux surprendre le spectateur une fois la fin survenue. Tout de même malin, il se caractérise un peu comme la version sans prétention du Prestige, multipliant les points communs avec, heureusement, nombre de qualités qui diffèrent de l'oeuvre de base.
La principale, un Edward Norton en maître magicien torturé, héros tragique que n'aurait pas renié Shakespeare. Toujours aussi talentueux, il caractérise son personnage avec finesse et parcimonie, le rendant humain, attachant et charismatique. L'on pourra vanter le beau couple qu'il forme avec la ravissante Jessica Biel, sorte de Scarlett Johansson version marquise et prude.
C'est là qu'on tient la grande différence avec Le Prestige : l'histoire d'amour racontée, bien plus qu'un prétexte à un affrontement machiavélique, est surtout le support d'une intrigue touchante et personnelle, chaleureuse et émouvante; on y croit jusqu'à la fin, jusqu'à la duperie finale, bien filmée et interprétée par le sympathique Paul Giamatti, sorte d'inspecteur Lestrade de Guy Ritchie en moins sergent Garcia.
Face à eux, l'inconnu Rufus Sewell (déjà entraperçu dans La légende de Zorro et l'interminable téléfilm Hélène de Troie) campe un antagoniste crédible mais manquant d'un poil de charisme, méchant suffisamment faible pour représenter l'appât parfait à twists renversants. Au final, cette palette d'acteurs aux styles de films habituellement variés (ils viennent de tous les horizons : divertissements, films d'auteur, dtv plus ou moins mauvais...) campe des personnages crédibles et bien développés, attachants et marquants.
On notera aussi un sacré travail sur les lumières, les couleurs et les décors, en plus de magnifiques costumes terminant d'assoir une reproduction d'époque fidèle et visuellement très fournie. C'est travaillé, toujours très optimiste durant la première partie, beaucoup plus sombre dans sa seconde avant d'enfin retrouver le ton voulu au départ par un twist final qui aurait pu paraître affreusement niais et prévisible si les pistes n'étaient pas si bien effacées, et les personnages développés avec talent.
C'est au final comme une libération pour le spectateur que de tomber sur une happy-end où il n'en voyait aucune possibilité, dernière preuve que L'Illusionniste porte bien son nom. Malin, beau, certes peu original mais divertissant et sans réelles longueurs. Un film à twist qui ménage bien son suspens et nous présente une pléthore d'acteurs talentueux; n'est-ce pas ce que l'on voulait à la base? Mission accomplie.