Outre la filiation évidente avec "Scarface", dont il partage le même acteur principal dans un rôle jumeau, je rapprocherai "Carlito's Way" d'un autre film de Brian De Palma : "The Untouchables", tourné sept ans auparavant.
En effet, les deux long-métrages partagent une réalisation à la fois flamboyante et millimétrée, jalonnée de morceaux de bravoure qui se répondent mutuellement, et qui viennent compenser un scénario relativement simple et linéaire.
Ainsi, la séquence finale à l'intérieur de la gare, modèle de dilatation du temps par la mise en scène, rappelle instantanément la scène de la poussette dans les escaliers d'une autre gare, celle des "Incorruptibles".
Dans "L'impasse", on se souviendra aussi longtemps de la scène initiale dans le tripot, avec le cousin exalté et les joueurs de billard, ou encore de toute la magnifique séquence en bateau, lors de l'évasion du parrain italien, dans un crépuscule brumeux du meilleur effet.
Visuellement, "Carlito's Way" se distingue par un style assez baroque souvent proche du kitsch, et il faut tout le talent de De Palma pour ne pas basculer du mauvais côté.
Par exemple, la tenue vestimentaire de Brigante, un long manteau de cuir noir façon "The Crow", apparaît presque ridicule au départ, puis finit par en imposer.
Le scénario signé David Koepp s'avère très simple mais efficace ; dès les premiers instants, la voix-off de Brigante nous avertit de l'issue finale, mais cette tragédie annoncée se suit jusqu'au bout avec intérêt - même si forcément, l'ensemble manque de surprise et de mystère.
Atout numéro 1 du film, Al Pacino incarne un personnage à sa mesure, bandit d'honneur sur la voie d'une impossible rédemption, formant un tandem mémorable avec l'avocat expansif joué par Sean Penn (dans l'un de ses rôles les plus marquants).
Je reste plus réservé sur le choix de Penelope Ann Miller, dont les charmes pâlots me laissent personnellement insensible. Mais je comprends que cette grande pouliche blonde puisse constituer le fantasme ultime d'un petit immigré portoricain (et celui d'un artiste cérébral d'origine italienne...).
Au final, "Carlito's Way" laissera une belle empreinte, s'inscrivant parmi les meilleurs films de gangsters ; cette fausse suite de "Scarface" parvient à réconcilier les véritables cinéphiles et les amateurs de bons divertissements, ce qui n'est pas le moindre de ses mérites.