La Bataille de la Neretva est l'équivalent Yougoslave du Guerre et Paix de Sergei Bondarchuk, à savoir un film d'état doté d'un budget considérable et destiné à booster le moral du bon peuple prolétarien.
Contrairement à son modèle Soviétique, La Bataille de Neretva se fend d'un casting de stars locales et internationales. Et il faut bien avouer qu'il y a du beau monde : Yul Brynner, Franco Nero, Orson Welles, Sergei Bondarchuk, Curd Jurgens, Anthony Dawson ou encore Hardy Kruger, tous ont répondu présent à l'appel du Maréchal Tito.
Le film recrée la marche des partisans (et des réfugiés civils les accompagnant) vers la rivière Neretva sous le feu des troupes Allemandes, Italiennes et des milices locales.
Le métrage suit la configuration classique du film de guerre. De multiples personnages dans chacun des camps permettent d'avoir les différents points de vue autour de la bataille. Bien évidemment, ce sont les partisans qui se taillent la part du lion avec un ensemble de sous intrigues amoureuses et/ou dramatiques destinées à humaniser au maximum le récit et intensifier l'impact émotionnel des combats.
Ces derniers sont bien sur la grande attraction du film. Usant de nombreux plans larges et de mouvements fluides, Bulajic (épaulé par Bondarchuk lui même) met soigneusement en valeur la beauté des paysages Yougoslaves, l'abondance de la figuration et du matériel et encore la débauche de pyrotechnie. Le but est régulièrement atteint : On ressent l'envergure de la bataille et l'âpreté des combats. Seuls défauts, déjà présent dans le Guerre et Paix de Bondarchuck, une topographie des lieux de combats un peu obscur qui empêche d'apprécier pleinement les stratégies déployées et l'absence de sang et autres mutilations accroissant le réalisme. Reste que, même avec ces défauts, ces batailles enfoncent aisément celles de la plupart des films de guerre issus du bloc Ouest. La dernière, qui voit s'opposer partisans et milice locale, fait même preuve d'une belle inspiration avec nos héros snipant leurs adversaires dans un cimetière. Symbolique, visuellement magnifique et profondément tragique.
Il est toutefois difficile de juger correctement La Bataille de la Neretva tant il existe de multiples versions. La version visionnée ici est le montage US. Avantage : Une bonne partie du casting internationale parle avec sa vrai voix (en Anglais donc) et on gagne une BO signée du grand Bernard Herrmann (pas sa meilleure mais ça reste du Herrmann donc du très bon). Inconvénient : Un montage à la truelle dont on sent bien que de multiples séquences de développement des personnages ont été enlevées. En tout état de cause, le visionnage de la version longue semble nécessaire pour vraiment rendre justice au film.
A noter que, bien qu'il s'agisse d'un film à vocation propagandiste, le portrait qui est fait des adversaires n'est pas aussi manichéen qu'on pourrait le croire. Ainsi, le personnage du capitaine Italien Riva ne porte pas plus que cela le fascisme dans son coeur. Même le camps Allemand n'est pas montré comme un tas des monstres assoiffés de sang mais davantage comme des professionnels déterminés à atteindre les objectifs qui leur ont été fixés autant que faire se peut. Une observation qui sera peut être tempérée par la version longue mais qui incite à un peu de réflexion au vu d'œuvres indépendantes comme Rambo 2/3 et autres Aube Rouge.