14 ans après Festen, Thomas Vinterberg était de retour en compétition au Festival de Cannes. Bilan : un prix d'interprétation masculine (mérité) dans l'escarcelle et un film par trop convenu pour vraiment être choc.
Le sujet a de quoi effrayer n'importe quel spectateur : dans une petite ville danoise, Lucas (Mads Mikkelsen, le méchant de Casino Royale) est injustement accusé de pédophilie sur les dires d'une fillette. Il devient petit à petit la proie d'une horde de villageois fous de colère et de violence. Comble de l'ironie, ce sont là ses propres amis avec il partageait la passion de la chasse. Le genre d'histoire qui vous fait dire "cela pourrait vous arriver". On pense d'abord à l'affaire Outreau ou au faux coupable de Furie le chef d'oeuvre de Fritz, Lang. mais plus encore c'est à un Dupont Lajoie au pays du froid (le film se déroule de novembre à décembre) auquel nous convie le cinéaste danois ; une peinture de la bétise ordinaire avec un regard porté sur le genre humain sans fioritures (certains diraient sans finesse). Grand misanthrope, Vinterberg décrit cette communauté d'abord dans l'amitié virile puis dans la loi du talion (la Police classant rapidement sans suite cette affaire imaginaire).
Dans son écriture et son déroulement, le scénario a les défauts de ses qualités : à la fois précis et cousu de fil blanc. Vinterberg explicite presque didactiquement comment petit à petit une fillette en vient à raconter qu'un éducateur lui a montré son sexe, comment petit à petit, tout le monde se met à croire une gamine de 4 ans. Mais derrière chaque détail donné, on a un peu l'impression de voir le scénario se recomposer sous nos yeux. Une vision un peu trop caricaturale pour devenir réellement passionnante où la montée dramatique passe par des clichés du genre (Lucas , refoulé d'un magasin, la pierre envoyée à travers la vitre, l'animal de compagnie tué en représailles, le tabassage en groupe...). Dans la Chasse, il y a juste un micro-moment où l'on sent que tout pourrait basculer et nous bousculer dans nos certitudes : un personnage racontant que tous les enfants ont décrit de la même manière le sous-sol de la maison de Lucas...alors qu'il n'y a pas de sous-sol. Comme une extension du domaine du mensonge, un fantasme collectif qui s'étend. L'intérêt du film pourrait se situer dans cette interrogation mais Vinterberg ne s'y attarde pas et préfère faire dans l'action plus carrée. L'homme est habile, peut-être un peu trop et là, il se contente d'être un bon faiseur. Rien ne transcende donc vraiment le film, ni son sujet, ni sa réalisation. On loue néanmoins l'interprétation de Mads Mikkelsen - primé à Cannes - et convaincant dans le rôle de ce monsieur-tout-le-monde qui se retrouve dans un cauchemar éveillé (le reste du casting fait aussi le"job"). On peut aussi apprécier la fin, entre malaise et incertitude. Mais finalement, cela fait peu.
La Chasse, n'est donc pas suffisamment original et pas assez fort , pour vraiment marquer durablement. Un film presque"plaisant" le pire adjectif que l'on peut utiliser pour une oeuvre voulue par son auteur comme dérangeante.
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