Le film s’ouvre sur un gros insecte avançant péniblement sur un sol sablonneux. Il est là pour symboliser la vie du personnage que l'on s’apprête à suivre. Tome naît dans un contexte misérable où les femmes sont appelées à vendre leur corps pour subvenir aux besoins de la famille et espérer une place au soleil. Malgré son intelligence et ses talents de meneuses, c’est dans ce monde déchéant et humiliant qu’elle passera sa vie. Sa fille bâtarde Nabuko viendra briser cette lignée de prostituées en feignant de se lancer dans le métier pour arnaquer un vieux vicieux. Ce qui lui permettra de réaliser son rêve en achetant une terre agricole avec son amoureux. Mais à qui appartient l’enfant qu’elle porte ? Bah. Dans cet univers, les sentiments prennent le bord du refoulement. Les hommes en profitent bassement, les filles rient fortement ensemble par solidarité mais meurt à petit feu par en-dedans. Shõhei Imamura pose sa caméra sur la condition primaire de l’espèce humaine comme s’il était à la recherche du chaînon qui nous sépare de l’animal. Cela donne une société où l’inceste est monnaie courante : des papas qui ne savent pas vraiment s’ils sont le géniteur de l’enfant à naître, des fillettes qui demandent à leur supposé père s’ils sont mariés ensemble. L’univers n’est pas sans rappeler celui de Pasolini par l’aridité des images et la dureté de la vie qui est évoquée à travers les actions des protagonistes aux âmes balafrées.