"Some people take, some people get took"

Je suis bien contente de m’être décidée à le revoir celui-là ! Le petit 7 que je lui avais infligé me faisait mal au cœur. Sans doute parce que j’ai vu le film trop jeune, il ne m’avait laissé qu’un vague souvenir sympathique mais pas franchement grandiose. Or ce que j’ai vu hier soir n’est rien de moins qu’une petite merveille.


Il est étrange que ce film tellement charmant et drôle cache de si sombres critiques de l’Homme, à l’image de ce moment où, alors enchantés par Jack Lemmon (Baxter) qui égoutte des spaghettis avec une raquette de tennis, Shirley MacLaine (Fran) nous sort sa terrible théorie sur les deux catégories d’individus de ce monde, ceux qui prennent, et ceux qui sont pris.
Et c’est en effet tout ce dont parle le film. Ceux qui prennent par la force ce qu’ils désirent, un appartement, une promotion, une femme ! Et ceux qui sont pris, qui subissent ces désirs : Baxter prête son appartement parce qu’il ne sait pas dire non et voit une promotion potentielle, les secrétaires se laissent berner par des promesses de divorces de leurs amants mariés, ou se font pincer les fesses dans les ascenseurs par de gros pervers… Le film dénonce le fonctionnement d'une société impersonnelle, où ceux qui réussissent sont ceux qui trichent, soudoient, menacent, et non ceux qui méritent, comme le découvrira à ses dépends Baxter.


Ce ton cynique (attention spoil) est également souligné par la tentative de suicide de Fran et le presque complet désintéressement du responsable de ce drame, à l’image de l’individu en détresse dont la société n’a que faire. Elle est sauvée par Baxter, un homme comme elle, pris dans les filets des « takers », avec un cœur gros comme ça.


Heureusement d’un autre côté on a une comédie romantique joyeuse et amusante, pleine de douceur et de moments charmants. Jack Lemmon est génial dans ce personnage d’amoureux transi et timide, un peu maladroit mais tellement généreux, qui joue au gin et fait la cuisine. Shirley MacLaine ressemble à un petit oiseau blessé, délaissée par la vie et pourtant parfois tellement pleine d’entrain. Un petit coup de cœur aussi pour les voisins de Baxter, un médecin et sa femme, qui apportent une belle touche d’humour au film. Avec à la fois un regard plein de reproches et de bienveillance pour Baxter, ils sont une véritable soupape de gentillesse et de solidarité.


Une magnifique comédie donc, qui même en faisant un constat terrible, n’arrive pas à nous ôter le sourire béat provoqué par la dernière scène…

Créée

le 9 nov. 2012

Critique lue 2.1K fois

51 j'aime

14 commentaires

Melly

Écrit par

Critique lue 2.1K fois

51
14

D'autres avis sur La Garçonnière

La Garçonnière
Melly
10

"Some people take, some people get took"

Je suis bien contente de m’être décidée à le revoir celui-là ! Le petit 7 que je lui avais infligé me faisait mal au cœur. Sans doute parce que j’ai vu le film trop jeune, il ne m’avait laissé qu’un...

le 9 nov. 2012

51 j'aime

14

La Garçonnière
SanFelice
9

Why do people have to love people anyway?

De La Garçonnière, je gardais l'image d'un film tout en équilibre subtil entre rire et émotion, avec des acteurs prodigieux et toutes les qualités habituelles de Billy Wilder. J'avais oublié que le...

le 26 sept. 2017

45 j'aime

9

La Garçonnière
raisin_ver
9

Critique de La Garçonnière par raisin_ver

CC Baxter travaille pour Consolidated Life, une compagnie d'assurances new-yorkaise de 31 259 employés. Dur dur de se faire une place au soleil dans ces conditions, mais CC, en plus d'être doué, a le...

le 26 déc. 2010

41 j'aime

10

Du même critique

Les Suffragettes
Melly
7

Le féminisme n'est pas un gros mot

Ce qui est amusant, et surtout triste, en ces temps de renaissance des questionnements féministes, c’est de voir les journalistes demander aux actrices si elles le sont, féministes. Peut-être que je...

le 22 nov. 2015

100 j'aime

24

Indiscrétions
Melly
10

Les Dieux sont morts 2.0

J’ai décidé de réécrire cette critique parce que, rédigée il y a longtemps, je trouve qu’elle ne reflétait pas vraiment la raison de mon amour pour ce film. Quand je repense à Indiscrétions, ce qui...

le 21 févr. 2011

90 j'aime

14

Royal Affair
Melly
8

Mikkel Boe film!

Histoire véridique de Johann Struensee, médecin et ami du roi fou Christian VII de Danemark, qui deviendra l’amant de la reine Caroline Mathilde et usera de son influence peu à peu grandissante pour...

le 25 nov. 2012

89 j'aime

19